Le ratio des charges d’exploitation : Protégez votre rentabilité et votre santé financière
Bien des choses ont changé en un an. Les coûts d’emprunt ont grimpé en 2018 par rapport à leur creux historique d’il y a un an. Pendant la même période, les recettes des entreprises agricoles ont stagné à l’échelle nationale. Tout au long du mois de mars, l’équipe des Services économiques de FAC analysera l’évolution de ces données financières et plus encore. Revenez nous lire chaque semaine pour suivre l’évolution de l’agriculture canadienne et apprendre comment les principaux outils financiers peuvent vous aider à garder une longueur d’avance.
L’augmentation du coût des intrants agricoles ou la baisse des prix des produits de base risque fort d’exercer une pression sur les marges bénéficiaires cette année. Si la situation se produit, je recommande aux exploitations agricoles de miser sur l’efficience. Pour ce faire, l’utilisation du ratio des charges d’exploitation vous facilitera la tâche.
Ratio des charges d’exploitation
Le ratio des charges d’exploitation mesure les coûts variables d’une exploitation par rapport à son revenu brut.
Ratio des charges d’exploitation = Dépenses d’exploitation totales / revenu brut
Les coûts variables comprennent les dépenses d’exploitation quotidiennes (main-d’œuvre, alimentation animale, protection des cultures, carburant, entretien, assurance, réparations, et honoraires des spécialistes agricoles, par exemple). Les paiements de prêts, l’amortissement et les améliorations apportées aux immobilisations sont exclus des charges d’exploitation.
Fonctionnement
Un ratio des charges d’exploitation de 60 % indique qu’une exploitation consacre 60 % de ses revenus aux dépenses variables. Si le ratio des charges d’exploitation est trop élevé, les dépenses d’une ferme peuvent être trop élevées pour les recettes qu’elle génère, exposant ainsi le producteur à des difficultés financières en cas de détérioration des conditions du marché. Par ailleurs, un ratio des charges d’exploitation trop élevé réduit également le revenu disponible pour couvrir les coûts fixes ou constituer un capital.
Mise en garde
La rentabilité et le ratio des charges d’exploitation ne sont pas directement comparables entre les différents secteurs, car le ratio des charges d’exploitation illustre des tendances en matière de coûts et de recettes propres à chaque secteur. Nous conseillons plutôt de surveiller les tendances historiques.
Nouvelle hausse des coûts des intrants dans tous les secteurs
La croissance des dépenses exercera une pression sur la rentabilité de l’agriculture canadienne en 2019. Celle-ci a été éprouvée en 2018, certains marchés ayant été frappés plus durement que d’autres par les turbulences qui ont marqué cette année. La volatilité des prix découlant des différends commerciaux a porté atteinte aux marges du secteur porcin tandis que le prix des produits laitiers a augmenté pendant la deuxième moitié de l’année. Tous les secteurs ont toutefois été confrontés à une hausse des coûts des intrants agricoles.
Je prévois que ces coûts augmenteront de nouveau en 2019, de manière suffisante pour exercer une pression soutenue sur la rentabilité du secteur. Le ratio des charges d’exploitation est l’un des moyens les plus efficaces de comprendre et gérer la relation fluide entre les charges d’exploitation et les recettes d’un secteur.
Le ratio moyen des charges d’exploitation est révélateur de la rentabilité d’un secteur
Étant donné la pression qui risque de s’exercer sur les ratios des charges d’exploitation en 2019, jetons un coup d’œil à l’historique le plus récent de chaque ratio. La figure 1 illustre de quelle manière l’évolution variable des recettes et des coûts a entraîné des différences dans le ratio moyen des charges d’exploitation des fermes laitières, porcines, bovines et de céréales et d’oléagineux*.
Figure 1 : L’écart moyen entre les revenus et les dépenses est stable dans le secteur laitier
Des quatre secteurs, celui des céréales et oléagineux a enregistré l’amélioration la plus constante de son ratio des charges d’exploitation entre 2013 et 2017. Les producteurs ont bénéficié d’une forte croissance des recettes au cours de la période tout en profitant de hausses plus faibles des prix des intrants de culture. Les producteurs bovins et porcins ont, pour leur part, été confrontés à une volatilité accrue des recettes pendant cette période, ce qui a entraîné des fluctuations plus importantes du ratio des charges d’exploitation pour ces secteurs.
Des gains d’efficience permettent au secteur laitier de survivre à la faiblesse des prix
Les recettes brutes du secteur laitier ont grimpé de 8,1 % entre 2014 et 2017, et ce, en dépit d’un surplus grandissant de solides non gras et d’une chute de prix des produits de lait écrémé. Or, la croissance des recettes du secteur a plutôt été avantagée par la forte croissance de la production.
L’augmentation de la production a nécessité davantage d’intrants, ce qui pourrait avoir fait grimper les charges variables. Le ratio des charges d’exploitation du secteur était toutefois stable. Les producteurs laitiers canadiens se situant dans la tranche supérieure de 50 % n’ont consacré pas plus de 0,67 $ aux charges d’exploitation pour chaque dollar de revenu chaque année.
La stabilité du ratio des charges d’exploitation du secteur laitier est très réjouissante. À mesure que les coûts augmentaient de concert avec la hausse de la production, les fermes laitières canadiennes ont mis en place des mesures d’efficience afin de s’assurer que la proportion des ressources variables utilisées pour générer un dollar de revenu demeure la même.
Que réserve l’avenir?
Dans les périodes où les dépenses croissent plus vite que le revenu, le ratio des charges d’exploitation risque d’augmenter, suggérant une baisse de la rentabilité. Cela peut devenir un problème plus grave si cette tendance se poursuit pendant plusieurs années. Des mesures d’efficience – la réduction au minimum des coûts de production à l’aide de la bonne combinaison d’intrants agricoles – figurent parmi les outils les plus efficaces qui sont à la disposition des producteurs pour gérer leur rentabilité en 2019.
Le ratio des charges d’exploitation devrait être utilisé de concert avec d’autres ratios afin d’évaluer adéquatement votre santé financière globale. Travaillez avec votre prêteur et votre comptable pour déterminer les ratios suggérés pour votre secteur d’activité et assurez-vous de les comprendre en fonction de votre propre stratégie et des risques auxquels votre entreprise est exposée.
* Cette analyse est fondée sur les données du portefeuille de FAC (2013-2017).
Savez-vous utiliser sans difficulté les états financiers pour améliorer la gestion de votre exploitation? Il serait judicieux de commencer par consulter votre comptable ou un directeur des relations d’affaires de FAC.
Vice-président exécutif, Stratégie et Impact et économiste en chef
Jean-Philippe est Vice-président exécutif, Stratégie et Impact et économiste en chef à FAC. Il offre des conseils qui aident à orienter la stratégie de FAC et qui servent à identifier les risques et opportunités dans l’environnement d’affaires. En plus d’agir comme porte-parole de FAC pour des questions économiques, Jean-Philippe offre ses commentaires sur l'industrie agricole et agroalimentaire dans des vidéos et le blogue des Services économiques FAC.
Avant de se joindre à FAC en 2010, Jean-Philippe était professeur d’agroéconomie à l’Université North Carolina State et à l’Université Laval. Jean-Philippe détient le titre de Fellow de la Société canadienne d’agroéconomie. Il a obtenu son doctorat en économique de l’Université d’Iowa State en 1999.