Construire un bon entrepôt de pommes de terre est un investissement judicieux

J’ai récemment visité un entrepôt de pommes de terre ultramoderne dans l’ouest du Manitoba, un très grand bâtiment tout équipé. J’ai ressenti l’enthousiasme et la fierté du propriétaire de ce grand entrepôt qui réunit toutes les conditions pour qu’après la saison d’entreposage, des pommes de terre d’excellente qualité et en bon état puissent être livrées juste à temps à l’usine de transformation.

La livraison « juste-à-temps » n’est pas nouvelle, mais elle répond aux nouvelles attentes à l’égard des systèmes agricoles pour tenir compte des changements climatiques, des répercussions environnementales, de la durabilité et des interdictions d’exportation. Parallèlement, elle contribue à améliorer la qualité et à réduire les coûts dans une industrie en constante évolution.

En revanche, est-il justifié d’investir aussi massivement dans des installations d’entreposage? La réponse à cette question se trouve dans l’agriculture de précision, tous les jours, 24 heures sur 24. L’agriculture a évolué et s’est toujours adaptée aux nouvelles tendances du marché, les producteurs devant livrer au bon endroit et au bon moment. Ce concept est aussi ancien que l’agriculture elle-même.

Le printemps dernier, une interdiction d’exportation qui a touché l’Île-du-Prince-Édouard a obligé les producteurs à entreposer leurs pommes de terre. Pour éviter une dégradation de la qualité du produit, une attention particulière doit être accordée aux pommes de terre pendant la période suivant la récolte. Ainsi, la construction d’installations d’entreposage de pommes de terre efficientes permet non seulement de gérer efficacement le risque, mais elle est également essentielle pour soutenir et protéger l’investissement du producteur.

Au cours de la dernière décennie, la production accrue de pommes de terre découlait principalement de la demande accrue de l’industrie de la transformation des produits surgelés qui doit pouvoir compter sur un approvisionnement en tubercules de première qualité, tout au long de l’année. La capacité d’entreposage globale a augmenté, tout comme la proportion de bonnes installations d’entreposage disposant d’un meilleur contrôle de la température et de l’humidité. Pendant la saison de la récolte, de la mi-août au début octobre, les transformateurs reçoivent les pommes de terre directement du champ. En dehors de cette période, ils s’approvisionnent auprès d’installations d’entreposage.

Relever les défis en construisant une installation d’entreposage de pommes de terre ultramoderne

Les patates sont des organismes vivants qui produisent de la chaleur par la respiration et la dessiccation résulte à la fois de la respiration et de l’évaporation. Un entrepôt efficace à climat contrôlé peut permettre de conserver les tubercules jusqu’à 10 mois. L’objectif est de maintenir un produit sain en lui offrant des conditions ambiantes parfaitement maîtrisées.

Pour répondre à toutes les exigences et éviter la détérioration et les pertes après récolte des pommes de terre de consommation en frais ou destinées à la transformation, celles-ci sont entreposées dans de grandes installations à climat contrôlé.

Les pommes de terre sont conservées dans de grandes installations d’entreposage bien équipées, à des températures allant de 2 à 10 °C et dans un environnement sombre et bien ventilé, avec une humidité relative élevée (de 85 à 98 %). Ces conditions préviennent la pourriture et accélèrent le processus de cicatrisation des tubercules.

Conception de l’entrepôt – entreposage en vrac ou entreposage en boîte

Les principaux facteurs tels que le style, l’isolation, la ventilation et l’humidification de la structure et les options comme le chauffage ou la réfrigération auxiliaire auront une incidence sur la santé et la qualité des tubercules.

Entreposage en vrac

De loin le concept d’entreposage le plus populaire, le système d’empilage en vrac, généralement moins cher, permet aux producteurs de conserver le produit plus longtemps et garantit une qualité optimale. Le produit entreposé en vrac est conservé sur un plancher muni de fentes ou des conduits d’aération, notamment des trous qui acheminent l’air vers le haut, à travers le tas de pommes de terre. Les options comprennent notamment des ventilo-convecteurs internes ou externes. Le passage de l’air à travers le produit est assuré par des panneaux d’ouverture de canalisation qui s’ouvrent et se ferment manuellement.

Image : Bac d’entreposage en vrac.

Image : Fentes ou conduits d’aération au plancher, y compris des trous permettant à l’air de monter à travers le tas de pommes de terre.

Entreposage en boîte

L’entreposage en boîte est couramment utilisé pour les semences et les pommes de terre de table. Bien qu’il puisse y avoir des différences, les boîtes sont généralement d’une grandeur de 4 pi sur 4 pi sur 6 pi et contiennent environ 1500 livres de pommes de terre. Le bâtiment est une structure en acier de 26 pieds de haut, où l’on empile cinq à six boîtes l’une sur l’autre. Certaines installations ont des murs entièrement en béton, ce qui crée une structure durable ayant une valeur d’isolation plus élevée qui facilite le contrôle de l’humidité.

La conception de l’entreposage en boîte permet de faire circuler l’air par des fentes dans la paroi, à l’intérieur et autour du produit mis en boîte. Les options comprennent notamment un évent transversal et un ventilo-convecteur interne et externe. La conception des boîtes peut également inclure une ventilation transversale ou un ventilo-convecteur consolidé avec une buse d’admission d’air de reprise. Cette façon d’entreposer les pommes de terre réduit le risque de contamination, car elle permet de retirer les boîtes problématiques. L’entreposage en boîte nécessite des pratiques de manipulation des cultures beaucoup plus douces que celles utilisées pour l’entreposage en vrac.

Types de structures

Les bâtiments d’entreposage les plus courants sont fabriqués en béton, en bois ou à armature d’arceaux et avec un revêtement en métal ondulé. Les facteurs qui varient entre les différents types de bâtiments sont le coût d’investissement, la durabilité, la longévité et le type d’isolation requis pour l’enveloppe extérieure du bâtiment. Le type de bâtiment utilisé dans les différentes régions du pays varie également, souvent en fonction des conditions climatiques de chaque région.

Une zone de chargement fermée à l’avant de l’installation d’entreposage permet au producteur de charger confortablement les pommes de terre dans des conditions météorologiques difficiles et de réduire au minimum les problèmes liés aux tubercules réfrigérés. 

Isolation

L’entrepôt doit être correctement isolé et scellé pour maintenir les conditions nécessaires à la bonne santé des pommes de terre entreposées. En plus de réduire les pertes de chaleur et de contribuer à maintenir la température d’entreposage souhaitée, l’isolation est également essentielle pour éviter la condensation. L’eau de condensation qui s’égoutte sur les tubercules favorise le développement de pourritures molles et peut avoir des répercussions importantes sur la qualité des pommes de terre.

L’isolation a également une incidence sur la qualité de l’air intérieur en réduisant les pertes de chaleur par les murs et les plafonds, ce qui permet d’évacuer davantage de chaleur respiratoire du bâtiment par le système de ventilation. Par temps très froid, le système de ventilation fait entrer de l’air frais supplémentaire dans le bâtiment, ce qui permet de maintenir des niveaux adéquats d’oxygène et de réduire les niveaux de gaz délétères comme le dioxyde de carbone.

Ventilation

La ventilation est le facteur le plus important pour maintenir une température, une humidité relative et une qualité de l’air correctes dans le hangar d’entreposage. Elle est également essentielle pour lutter contre les problèmes éventuels causés par les maladies ou le gel. La conception de base du système de ventilation est semblable, quel que soit le type de structure d’entreposage. Un système de ventilation typique se compose de prises d’air, de ventilateurs, de chambres de répartition d’air, de conduits, d’évents d’évacuation et d’un système de contrôle.

La taille des composants du système de ventilation doit être choisie avec soin pour garantir une répartition uniforme de l’air de ventilation dans tout l’entrepôt. Les clapets de prise d’air doivent être conçus pour fermer les conduits de reprise proportionnellement à l’ouverture des prises d’air. Au fur et à mesure qu’une plus grande quantité d’air frais est requise, l’air de reprise transportant une chaleur ou une humidité excessive sera expulsé du bâtiment par les conduits de sortie. Cela est utile lorsqu’on essaie d’éliminer la chaleur excessive des pommes de terre tout juste récoltées.

Humidification

Dans des conditions normales d’entreposage, l’humidité relative de l’air fourni doit être maintenue à près de 98 %. Des humidificateurs devraient être installés immédiatement en aval des ventilateurs. Trois types d’humidificateurs sont couramment utilisés : les buses sous pression, les disques centrifuges rotatifs et les matériaux fibreux saturés d’eau. Les deux premiers types sont moins fréquents, car ils sont difficiles à réguler, ce qui entraîne un ajout excessif ou insuffisant d’eau dans les flux d’air. Le troisième type humidifie l’air lorsqu’il traverse un matériau fibreux, tout en évitant le problème des gouttelettes d’eau libres qui peuvent avoir une incidence sur la qualité des pommes de terre. Ce type d’unité d’humidification crée une résistance qui ralentit la circulation d’air, et doit donc être dimensionné en conséquence. La conception de l’humidificateur est essentielle.

Besoins calorifiques

La chaleur provenant de la respiration des pommes de terre doit être évacuée de l’installation d’entreposage pour maintenir le tas de pommes de terre à la température appropriée. L’air chaud est évacué, et une petite quantité d’air frais est mélangée à l’air de reprise pour maintenir le tas de pommes de terre au frais. La quantité d’air frais nécessaire à la régulation de la température dépend des températures extérieures. Dans des conditions normales d’entreposage, aucune chaleur auxiliaire n’est nécessaire pour maintenir le tas de pommes de terre à une température constante. Cependant, dans certaines circonstances, de l’air frais de l’extérieur est requis en plus de ce qui est nécessaire pour maintenir la température idéale dans l’entrepôt.

Réfrigération

La réfrigération doit être disponible pour toutes les pommes de terre entreposées à la fin du printemps et en été et peut être un atout lorsqu’on essaie d’éliminer la chaleur des tubercules récoltés pendant une saison chaude. Un système de réfrigération peut être une nouvelle installation, une modernisation, un châssis temporaire (mobile) ou un montage sur socle et comprend plusieurs configurations d’installation différentes en fonction des besoins et des applications. 

Autres caractéristiques

Les nouveaux bâtiments sont équipés de la télésurveillance, d’appareils de chauffage et de capteurs de CO2. Ces caractéristiques permettent d’atténuer les risques et de mieux gérer les différentes zones de l’entrepôt. Cela permet au producteur de gérer certaines zones plus sensibles à la pourriture en appliquant plus de chaleur ou en refroidissant une zone précise où la température est élevée – ce qui permet de conserver un produit de haute qualité et de réduire les pertes.

L’ajout de serpentins de réfrigération, d’unités d’humidification et de pièges lumineux dans l’évent d’évacuation crée une résistance et a une incidence sur la circulation de l’air, ce qui doit être pris en compte dans la conception du hangar d’entreposage.

Les systèmes plus avancés sont équipés d’un capteur de dioxyde de carbone (CO2) qui active le volet et fait entrer de l’air frais lorsque le niveau de CO2 dépasse une limite prédéfinie.

Résumé

Les deux heures de route vers l’ouest du Manitoba m’ont rappelé que les éléments les plus fondamentaux d’une installation ne sont pas toujours évidents au premier abord. L’entreposage des pommes de terre présente divers défis. La mise en place d’une installation d’entreposage à grande échelle avec un milieu ambiant optimal pour éviter la détérioration des pommes de terre et obtenir une qualité maximale des tubercules exige une compréhension approfondie de la gestion de l’entreposage des pommes de terre.

Les pertes de tubercules sont inévitables lorsque les pommes de terre ne sont pas entreposées correctement, et elles peuvent avoir une incidence importante sur les revenus de la ferme. Pour éviter cela, un bon entrepôt de pommes de terre est un actif agricole précieux et un investissement judicieux.

Article par : Peter Alder, évaluateur

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