Partenariats et famille font fleurir une exploitation serricole
Un facteur qui a grandement contribué à la réussite et à la rentabilité de l’entreprise au fil des ans a été la capacité de contrôler la commercialisation des produits agricoles, notamment par la vente directe aux consommateurs.
Un partenariat unique entre les secteurs de l’agriculture et de l’énergie de l’Alberta stimule la croissance d’une exploitation de légumes de serre située au nord de Red Deer et contribue à alimenter ses plans d’expansion.
Doef’s Greenhouses produit actuellement des poivrons, des concombres, de la laitue et des aubergines dans une serre de onze acres et fait l’objet d’une expansion de treize acres qui devrait être prête à entrer en production au début de 2021. Il s’agit de la première de quatre phases d’expansion de treize acres pour la famille Doef, qui détient 60 % des parts de l’entreprise familiale.
Être ouvert aux nouvelles idées
Les 40 % restant sont détenus par EnerMerge Inc., une société locale et copropriétaire de Horseshoe Power, qui possède et exploite une centrale de trigénération située à la ferme et dans les champs de gaz naturel environnants. La centrale qui produit de l’électricité, de la chaleur et du dioxyde de carbone (CO2) pourvoit à tous les besoins énergétiques de l’exploitation, si bien que la serre est presque entièrement indépendante du réseau d’alimentation et produit sa propre électricité.
Ce partenariat remonte à environ cinq ans, quand le directeur général d’EnerMerge, Brad Murray, a effectué un appel de démarchage auprès des Doef pour leur demander s’ils envisageraient de laisser la société devenir le fournisseur d’énergie de la ferme. EnerMerge possédait des puits de gaz autour de l’exploitation serricole, et M. Murray a fait valoir qu’une centrale de trigénération pourrait ajouter de la valeur aux deux entreprises.
« Nous avions déjà envisagé la mise sur pied d’une centrale de trigénération, mais nous ne voulions pas nous disperser en ayant à gérer une production additionnelle sur place. Nous avons donc effectué des études de faisabilité et des recherches sur ce concept opérationnel », dit Eric Doef, l’un des associés de l’exploitation serricole. « Nous sommes des producteurs agricoles et nous devons nous concentrer sur nos cultures pour obtenir une production optimale. Nos nouveaux partenaires, eux, se concentrent sur l’énergie en veillant au bon fonctionnement de la centrale. »
L’électricité produite par la centrale énergétique de la ferme alimente le système d’éclairage complémentaire à la lumière du soleil sur une superficie de neuf acres de la zone de production afin que la serre puisse faire pousser des cultures toute l’année. La chaleur résiduelle des moteurs de la centrale sert à chauffer l’eau, et le CO2 est mis à profit dans la serre pour favoriser la photosynthèse des plantes.
La centrale de trigénération est reliée au réseau local de distribution d’énergie, et l’électricité inutilisée — la serre n’a pas besoin de son système d’éclairage durant l’été, par exemple — est acheminée vers ce réseau. Une deuxième centrale de trigénération est en construction à côté de l’expansion de la serre; ces deux installations étant situées sur une nouvelle parcelle de terre en face de l’emplacement actuel de la ferme existante.
Eric, l’aîné d’une fratrie de cinq, s’est joint à l’entreprise familiale à temps plein en 2000. Son frère Paul et son beau-frère Phil Visscher y jouent aussi des rôles clés, sa femme exerce les fonctions de contrôle de l’entreprise, et ses parents, Joe et Helen, y travaillent également. L’entreprise a démarré il y a plus de 50 ans, à l’époque où Joe, fraîchement arrivé au Canada en provenance des Pays-Bas, à l’âge de 19 ans, a mis sur pied une petite exploitation serricole.
Gérer les marchés
Un facteur qui a grandement contribué à la réussite et à la rentabilité de l’entreprise au fil des ans a été la capacité de contrôler la commercialisation des produits agricoles, notamment par la vente directe aux consommateurs — ce qui n’est pas la norme dans le secteur serricole.
Joe et Helen ont fait leur première incursion dans la vente sur les marchés fermiers en 1973, à Red Deer, puis à Lacombe, où Joe a aussi été l’un des membres fondateurs du conseil d’administration. Aujourd’hui, les Doef vendent leurs produits sur différents marchés de la grande région d’Edmonton.
Dans les années 1980, les Doef se sont associés à plusieurs producteurs locaux pour fonder Pik‑N‑Pak Produce Ltd., un établissement où ils pouvaient emballer leurs produits frais au quotidien et les expédier sous une marque commune. Aujourd’hui, la serre est aussi partenaire de Sunfresh Farms Ltd., un distributeur qui approvisionne les grandes chaînes de magasins au détail du centre et le nord de l’Alberta.
Ce lien étroit avec les consommateurs s’est révélé un avantage particulier durant la pandémie de COVID-19 en ce sens qu’il a suscité un intérêt croissant pour la production alimentaire locale. C’est l’un des aspects qu’Eric apprécie le plus dans le secteur de la production serricole.
« Dans le contexte actuel, les gens sont particulièrement attirés par le local; ils veulent tisser des liens avec leur agriculteur, connaître la provenance de leurs aliments et savoir qu’ils peuvent avoir confiance en celle-ci. Les commentaires que nous recevons des clients, notamment dans les marchés de producteurs, au sujet des raisons pour lesquelles ils aiment nos produits sont rassurants et constituent pour nous l’un des principaux avantages de notre présence sur ces marchés. »
S’adapter aux conditions difficiles
Grâce aux protocoles en matière de sécurité alimentaire et de biosécurité déjà en place, les employés de la serre ont su s’adapter assez facilement aux mesures de protection supplémentaires liées à la COVID‑19. Étant donné que toute leur main-d’œuvre est locale, les Doef n’ont pas été touchés par la pénurie de travailleurs attribuable à la pandémie, contrairement aux serriculteurs qui emploient des travailleurs étrangers.
« Nous avons déjà été confrontés à des phytovirus, et les protocoles étaient semblables à ceux qui sont liés à la COVID : nous veillons à nous laver les mains régulièrement et à nettoyer les surfaces, et la serre offre amplement d’espace pour que nous puissions respecter la distanciation », explique Eric.
La lutte contre les phytovirus, les maladies et les parasites des plantes, en particulier les thysanoptères et l’oïdium, est un défi de tous les instants. C’est pourquoi la circulation dans la serre est limitée, et on s’assure d’acheter des semences de qualité auprès des fournisseurs. Un expert-conseil en productions végétales vient aussi régulièrement à la ferme.
En plus des membres de la famille, les Doef emploient environ 55 travailleurs dans leur serre, 20 à Pik‑N‑Pak et 10 qui s’occupent des marchés fermiers. L’expansion de la serre créera 40 autres emplois que la famille espère confier à des gens de la région. L’accès à une main-d’œuvre stable est toutefois une préoccupation constante, souligne Eric.
De façon générale, il envisage avec optimisme l’avenir du secteur serricole et est convaincu que la croissance de l’entreprise multipliera ses débouchés, notamment la production de nouvelles cultures, l’accès à de nouveaux marchés et de nouvelles façons d’acheminer les produits aux consommateurs.
« Plus que jamais, les gens recherchent des produits locaux frais qui s’inscrivent dans de saines habitudes alimentaires. Comme ils font aussi plus attention à ce qu’ils mangent, les fruits et les légumes figurent plus fréquemment au menu. » D’ailleurs, les Doef envisagent de se lancer dans la culture des fraises de serre.
L’autre facette de l’entreprise qui plaît à Eric est la possibilité de travailler avec sa famille, et les Doef ne cessent d’apporter des améliorations à ce chapitre.
« Nous sommes conscients que les entreprises familiales présentent des avantages extraordinaires, mais qu’elles peuvent aussi déraper. La responsabilisation et l’établissement de rapports sont indispensables pour nous assurer que nous atteignons nos objectifs et respectons nos budgets. C’est pourquoi nous essayons d’organiser régulièrement des réunions familiales, mais aussi avec nos partenaires et nos investisseurs. Nous exerçons aussi une diligence constante pour nous assurer que notre projet d’expansion demeure viable sur le plan financier. »
D’après un article de l’AgriSuccès par Lilian Schaer.
Le capital-risque est une option viable pour les entreprises qui sont prêtes à passer à la prochaine étape, mais il est essentiel de bien choisir le moment et de trouver le bon partenaire.