Quelqu’un convoite votre terre. Que faire?
La population et la capacité de développement industriel du Canada ne cessent de croître. Il faut de la place pour bâtir des habitations, des usines, des infrastructures et d’autres installations, et ce sont souvent les terres agricoles qui font les frais des nouveaux projets de construction.
Les promoteurs et les autorités régionales convoitent de plus en plus les terres agricoles pour alimenter la croissance. Les propriétaires fonciers doivent donc prendre des mesures supplémentaires pour s’assurer que leur entreprise agricole n’est pas désavantagée s’ils décident – ou s’ils sont contraints – de vendre.
Les promoteurs connaissent le système. Et vous?
Selon Quinn Ross, avocat établi en Ontario et fondateur du cabinet The Ross Firm spécialisé dans l’expropriation de biens et de terres, les exploitants agricoles doivent avant tout reconnaître qu’ils ne savent probablement pas tout du mécanisme d’acquisition des terres à des fins de développement, contrairement à la personne ou au groupe qui tente de les acquérir.
Une première étape cruciale consiste à solliciter les conseils juridiques de professionnels.Qu’il s’agisse d’un promoteur immobilier ou d’un gouvernement régional désireux de développer l’infrastructure publique, cet écart de connaissances désavantage grandement le propriétaire foncier quand vient le temps de déterminer si l’indemnisation proposée reflète adéquatement l’impact de l’acquisition. Une première étape cruciale consiste à solliciter les conseils juridiques de professionnels qui connaissent toutes les particularités de l’acquisition de terres et de l’expropriation. Il peut également être utile d’engager des discussions avec d’autres personnes susceptibles de subir des pressions pour vendre leurs terres dans le cadre d’un projet de développement d’envergure.
« L’objectif est de regrouper le plus grand nombre possible de personnes touchées; il est ainsi plus facile de gérer la diffusion de l’information et la vitesse d’exécution du projet. S’ils peuvent diviser pour mieux régner, ils le feront », affirme M. Ross, en parlant des groupes qui convoitent des terrains pour des projets visant plusieurs propriétés.
« Concrètement, nous réunissons un groupe de personnes, élaborons une méthodologie d’indemnisation et veillons à ce que l’ensemble du processus soit cohérent. Sinon, les acquéreurs vous informeront de la juste valeur marchande et essaieront simplement de faire avancer les choses. Si vous ne connaissez pas la marche à suivre et ne savez pas à quoi vous attendre, vous n’êtes pas en très bonne posture pour négocier. »
M. Ross recommande aussi aux propriétaires fonciers de faire preuve d’une grande vigilance lorsque des promoteurs privés prétendent travailler avec des délais très serrés.
« S’ils ne sont pas prêts à vous accorder quelques semaines pour que vous puissiez demander conseil, ce ne sont pas des gens avec qui vous devriez faire affaire. Personne ne peut acquérir de terres sans droit d’expropriation, même si on vous donne l’impression de pouvoir le faire. »
La complexité de l’indemnisation
D’après M. Ross, le premier obstacle est toujours de faire comprendre aux gens qu’ils s’apprêtent à perdre leur terre. En effet, cette prise de conscience peut être dévastatrice, et ce, même si une indemnisation est offerte.
Le calcul de l’indemnisation peut également être compliqué, car les montants proposés ne tiennent souvent pas compte de toutes les répercussions subies par les personnes et leurs entreprises agricoles.
« Aux yeux de la loi, les biens agricoles ne sont pas nécessairement considérés comme des entreprises, explique M. Ross. Il n’y a donc pas d’indemnisation prévue pour compenser les coûts supplémentaires liés à la présence d’un pylône hydroélectrique au milieu de votre terre pour les 50 prochaines années. »
Les complications sont inévitables
L’impact d’un projet de développement sur votre exploitation agricole peut aussi différer de ce qui vous a été présenté par l’organisme responsable du projet au départ. Graham Bolton, directeur principal des relations d’affaires à FAC en Colombie-Britannique, a aidé des clients à faire face à des pressions exercées par le développement qui ont posé plus de problèmes que ce qu’on les avait initialement amenés à croire.
« J’ai un client qui a été visé par trois expropriations. La dernière avait pour but la construction d’une autoroute sur ses terres », explique M. Bolton, en parlant d’un producteur de canneberges dont la tourbière a été scindée en deux par un projet autoroutier. La nouvelle infrastructure a considérablement compliqué les opérations logistiques de l’agriculteur, en particulier pendant la phase de construction.
M. Bolton encourage les exploitants agricoles à communiquer clairement les conséquences que le projet de développement aura sur eux et à rassembler autant de données et de preuves photographiques que possible. Il s’agit, selon lui, du seul moyen de plaider sa cause avec succès, le cas échéant.
Si votre terre est convoitée, considérez les éléments suivants :
Assurez-vous de connaître l’identité de l’acquéreur. Les municipalités et autres autorités régionales ont le pouvoir d’exproprier. Les promoteurs, non.
Ne vous laissez pas intimider par les moyens de pression. Même en cas d’expropriation, vous avez droit à un processus d’examen.
Déterminez la valeur réelle de vos biens et l’impact de la perte d’une partie de ces biens sur vos activités quotidiennes.
Faites appel à des conseillers qui s’y connaissent en expropriation. Plus vous avez de connaissances, plus votre pouvoir de négociation est grand.
D’après un article de l’AgriSuccès par Matt McIntosh.