La statistique à retenir pour la présente année de récolte
Au cours des trois prochaines semaines, nous nous pencherons sur les facteurs économiques fondamentaux qui peuvent vous aider à mieux comprendre ce qui se passe sur les marchés.
Nous examinerons en profondeur le ratio stocks‑utilisation. Il s’agit de l’un des meilleurs outils pour évaluer les futures fluctuations des prix ainsi que les tendances antérieures. Il est simple, facile à utiliser et instructif, soit un avantage indéniable dans la prévision des recettes et la création de plans de commercialisation judicieux.
L’analyse fondamentale des prix des produits de base examine les interactions entre des facteurs de l’offre et de la demande. Elle est au cœur même de l’analyse économique. Le ratio stocks‑utilisation (en anglais seulement) résume tous ces facteurs en une seule statistique, il est donc très efficace!
Ce ratio suppose que le prix d’un produit de base reflète sa rareté ou le manque actuel ou prévu de ce produit sur le marché. Lorsque l’offre d’un produit de base est restreinte par rapport à la demande, ses prix devraient être plus élevés. En revanche, une offre relativement importante, c’est-à-dire qui excède la demande actuelle ou future, entraînera des prix à la baisse.
Ce ratio est utilisé afin de comprendre les tendances antérieures du marché ou de façonner les prévisions quant aux stocks (l’offre) et à l’utilisation (la demande).
Calcul du ratio stocks‑utilisation
Un ratio stocks-utilisation mesure le volume des stocks d’un produit de base à un moment précis (p. ex. les stocks de fin d’année pour une année commerciale donnée), exprimés sous la forme d’une part du volume de l’utilisation totale de ce produit de base au cours de cette même année commerciale (ce qui sera utilisé sur le marché intérieur et ce qui sera exporté).
Comment cela fonctionne-t-il?
Les récentes prévisions du USDA au sujet du maïs des États‑Unis indiquent ce qui suit :
Stocks de maïs de fin de campagne à la fin de l’année commerciale 2017‑2018 |
2,18 milliards de boiss. |
Importations pour l’année commerciale 2018‑2019 |
0,05 milliard de boiss. |
Production en 2018* |
14,04 milliards de boiss. |
Stocks de maïs disponibles pour l’année commerciale 2018‑2019 |
16,27 milliards de boiss. |
Utilisation totale du maïs prévue par l’USDA en 2018‑2019** |
14,59 milliards de boiss. |
Prévisions des stocks de fin de campagne pour la fin de l’année commerciale 2018‑2019 |
1,68 milliard de boiss. |
Ratio stocks-utilisation du maïs à la fin de l’année commerciale 2018‑2019 |
1,68 milliard de boiss./14,59 milliards de boiss. = 11,5 % |
* Les conditions de culture aux États‑Unis ont indiqué des rendements potentiels qui, en tenant compte des superficies ensemencées estimées, fournissent la production prévue en 2018.
** Cette prédiction tient compte de toutes les utilisations anticipées du maïs : la production d’éthanol, les exportations, l’utilisation comme aliment pour animaux, la transformation à l’échelle nationale, etc.
Dans le cadre de l’exemple suivant, une hausse de l’utilisation totale du maïs en 2018‑2019 à 15,09 milliards de boisseaux entraînerait des stocks de fin d’année beaucoup plus bas (1,2 milliard de boisseaux) ainsi qu’un ratio de 7,8 % (1,18/15,09). Compte tenu de la forte utilisation du maïs, nous nous attendons à une hausse des prix du maïs. Au cours des 40 dernières années, le ratio stocks‑utilisation du maïs le plus bas a été enregistré en 1995 et se situait à 5 %. Il n’a jamais excédé 62 %, soit le ratio le plus élevé atteint en 1985.
La croissance de la production du maïs aux États‑Unis a largement surpassé la demande depuis l’année commerciale 2012‑2013 (Figure 1). Le ratio stocks-utilisation a plus que doublé au cours des quatre années qui ont suivi.
La légère baisse entre 2016‑2017 et 2017‑2018 devrait se creuser en 2018‑2019. Ce ratio à lui seul ne dit pas tout au sujet des récentes conditions du marché à l’échelle mondiale pour le maïs des États‑Unis, mais il donne une bonne indication des changements anticipés dans les prix du maïs des États-Unis.
Un faible ratio stocks-utilisation se traduit par des prix élevés
La ligne de tendance à la Figure 2 illustre que le ratio stocks-utilisation est manifestement lié au prix moyen du maïs des États-Unis. La courbe descendante de droite à gauche indique que les deux éléments entretiennent une relation négative : un ratio stocks‑utilisation élevé survient lorsque les prix du maïs sont bas (et inversement).
Les années au cours desquelles les ratios stocks-utilisation ont été les plus élevés (2016-2017 et 2017‑2018 comme l’indique la Figure 1) sont celles qui affichent les prix du maïs parmi les plus bas à la Figure 2. Par ailleurs, les années au cours desquelles les ratios ont été les plus bas à la Figure 1 (p. ex. 2011-2012 et 2012-2013) sont celles qui ont affiché les prix du maïs les plus élevés à la Figure 2 (à l’extrême gauche du Graphique 2).
Toutefois, il faut faire preuve d’une certaine réserve. Bien qu’il s’agisse d’un outil puissant, le ratio stocks‑utilisation n’est pas toujours précis.
Par exemple, il n’a pas été un bon indicateur prévisionnel du prix moyen du maïs aux États‑Unis en 2012‑2013 et 2013‑2014. Le ratio en 2012‑2013 (7,4 %) a été le plus bas enregistré au cours des dix dernières années. Toutefois, la diminution de la production en raison de la sécheresse durant l’année commerciale 2012‑2013 a entraîné une hausse des prix en prévision d’éventuelles pénuries. Les prix plus élevés ont incité les acheteurs à se tourner vers un autre produit de base que le maïs, ce qui a ralenti son utilisation totale. Ainsi, le ratio n’a pas pu augmenter davantage. En raison d’un facteur inhabituel (une sécheresse importante), il a été plus difficile de prévoir le prix moyen du maïs en 2012‑2013.
Comment utiliser le rapport pour prendre de meilleures décisions?
Puisque les ratios stocks-utilisation sont révélateurs, les marchés des produits de base réagissent à leurs conséquences. Toute révision du ratio de 2018‑2019 (à la hausse ou à la baisse) fera évoluer les prix à terme. Vous pouvez également utiliser ce ratio pour prévoir vos revenus et créer une plateforme de commercialisation qui reflète les besoins, défis et occasions de votre exploitation.
La prochaine publication de l’USDA paraîtra le 12 juin. Nous serons de retour la semaine prochaine pour vous présenter une mise à jour sur le ratio stocks-utilisation. Par ailleurs, nous examinerons la valeur ajoutée qu’il apporte dans le cadre de l’analyse de la volatilité des marchés.
Vice-président exécutif, Stratégie et Impact et économiste en chef
Jean-Philippe est Vice-président exécutif, Stratégie et Impact et économiste en chef à FAC. Il offre des conseils qui aident à orienter la stratégie de FAC et qui servent à identifier les risques et opportunités dans l’environnement d’affaires. En plus d’agir comme porte-parole de FAC pour des questions économiques, Jean-Philippe offre ses commentaires sur l'industrie agricole et agroalimentaire dans des vidéos et le blogue des Services économiques FAC.
Avant de se joindre à FAC en 2010, Jean-Philippe était professeur d’agroéconomie à l’Université North Carolina State et à l’Université Laval. Jean-Philippe détient le titre de Fellow de la Société canadienne d’agroéconomie. Il a obtenu son doctorat en économique de l’Université d’Iowa State en 1999.