Mise à jour des perspectives 2020 pour le secteur des céréales, oléagineux et légumineuses : la météo et la demande mondiale influenceront la rentabilité
Au cours du mois de juillet, l’équipe des Services économiques de Financement agricole Canada (FAC) mettra à jour ses prévisions de rentabilité pour trois secteurs agricoles canadiens (la viande rouge, les produits laitiers, et les céréales, oléagineux et légumineuses). Nous décrirons ce qui s’est passé en 2020 jusqu’à présent et ce qu’il faut surveiller au cours des six prochains mois.
Dans nos perspectives de janvier 2020 pour le secteur des céréales, oléagineux et légumineuses, nous avons cerné trois grandes tendances susceptibles d’influencer la rentabilité du secteur :
L’influence des tensions commerciales sur l’économie mondiale et les marchés agroalimentaires
Les perturbations de la peste porcine africaine sur les marchés du bétail et de la viande
L’accroissement des stocks mondiaux malgré des conditions de cultures difficiles
Quel est notre bilan pour le premier semestre?
La pandémie de COVID-19 a déclenché une récession mondiale, mise en évidence par de graves perturbations de la chaîne d’approvisionnement, notamment des réductions de la capacité de transformation et des fermetures d’usines. Malgré ces difficultés, le commerce des céréales, des oléagineux et des légumineuses du Canada a donné un bon rendement au cours du premier semestre de 2020.
Selon la Commission canadienne des grains, les livraisons des producteurs ont augmenté de 13,5 % depuis le début de l’année, et les exportations, de 8,1 %. Les exportations sont en concurrence avec une forte demande intérieure : Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) prévoit que l’utilisation intérieure des principales grandes cultures pour l’année de récolte de 2019-2020 sera de 3 % supérieure à celle de l’année dernière.
Les tensions commerciales mondiales ont continué de peser sur les marchés. En janvier, la Chine et les États-Unis avaient convenu de la première phase d’un accord commercial, qui prévoyait une augmentation de 50 % de la valeur des exportations de produits agricoles américains vers la Chine par rapport à 2017. Pourtant, il semble que la Chine n’atteindra pas son objectif ambitieux – même si ses récents achats de maïs, de blé et de sorgho ont été importants. Les relations commerciales entre le Canada et la Chine sont demeurées plutôt tièdes. À l’inverse, l’Inde a réduit ses droits de douane ce qui a stimulé la demande pour les exportations de lentilles canadiennes.
Les importantes réserves mondiales des principaux grains et oléagineux, et les fluctuations de la demande de denrées alimentaires et d’éthanol en raison de la COVID-19 ont entraîné une évolution des prix qui diffère de celle prévue en janvier (tableau 1).
Tableau 1. Prix des légumineuses plus élevés que les prévisions de janvier, et prix mixtes pour les céréales et oléagineux
Nos prévisions révisées pour le maïs, le soya et l’orge sont en baisse par rapport aux prix enregistrés au cours des six premiers mois de l’année. Les lentilles continuent d’afficher une tendance à la hausse, mais les pois devraient connaître une légère baisse au cours du second semestre de l’année. Les prix du canola et du blé de printemps devraient se situer au-dessus de la fourchette observée récemment, tandis que le blé dur devrait connaître une évolution latérale.
Tendances à surveiller pour le reste de l’année 2020
Équilibre entre l’offre et la demande au Canada, aux États-Unis et dans le reste du monde
Céréales
Une demande plus faible est à l’origine de la faiblesse générale des prix des céréales et du maïs par rapport à nos projections de janvier. La production canadienne de blé (à l’exception du blé dur) devrait augmenter en 2020, car les rendements plus élevés compenseront la diminution des acres ensemencés. L’ensemble du marché du blé reste bien approvisionné à l’échelle mondiale, malgré les révisions à la baisse de la production dues à des préoccupations concernant les conditions météorologiques. De grandes parties de l’Alberta et de la Saskatchewan ont connu des précipitations supérieures à la moyenne en 2020. La qualité sera un moteur important pour les revenus canadiens.
La production canadienne de maïs devrait augmenter de 3 %, car les rendements plus élevés devraient compenser la diminution des acres plantés. Plusieurs régions de l’Ontario et du Québec sont plus sèches que la normale. Le resserrement de l’offre intérieure en 2019-2020 a soutenu les prix locaux du maïs, malgré le fait que les contrats à terme du maïs américain approchent les 3 $ US en raison des réductions considérables de la production d’éthanol de maïs.
Dans l’ensemble, la production américaine de maïs devrait augmenter de plus de 10 % en 2020 étant donné un accroissement des acres plantés de maïs, soit 92 millions d’acres, une augmentation de 2,5 % par rapport à 2019. Des pluies au bon moment seront essentielles pour que les États-Unis puissent produire la grande récolte de maïs attendue. L’USDA prévoit un rebond de la production d’éthanol au cours du second semestre de 2020, à condition que la consommation de carburant continue d’augmenter, une perspective très incertaine pour le moment.
Oléagineux
En 2020, la production intérieure de canola devrait augmenter de 1 %, car la diminution des acres ensemencés sera compensée par des rendements plus élevés. À l’inverse, la production canadienne de soya devrait diminuer, les acres ensemencés devant diminuer de 11 % en 2020. Le canola et le soya ont des perspectives de prix différentes, principalement en raison de différences dans les projections de la demande. La demande de l’Union européenne pour le canola canadien devrait rester forte, même si l’on tient compte de la concurrence potentielle de l’Ukraine et de l’Australie.
Les acres ensemencés de soya aux États-Unis devraient augmenter de 11 % en 2020, mais les stocks de fin d’année pour 2020-2021 devraient diminuer. Les exportations américaines de soya pour 2019-2020 semblent correspondre au rythme prévu par l’USDA, mais une perspective incertaine des importations chinoises de soya en 2020-2021 pèsera sur les prix.
Légumineuses
Les prix des légumineuses se sont améliorés en raison d’une demande plus forte et d’une offre plus restreinte. La production canadienne de lentilles devrait augmenter de 14 %, principalement en raison de l’accroissement des acres ensemencés. La production de haricots secs devrait également augmenter en 2020-2021 en raison de rendements plus élevés, tandis que la production de pois secs restera inchangée.
À court terme, la demande intérieure de protéines végétales reste forte compte tenu des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement en viande et de l’inflation qui en résulte. La demande mondiale est liée à la croissance économique et au bon fonctionnement des chaînes d’approvisionnement, qui dépendent de la reprise post-pandémie.
Force des économies canadienne et mondiale
La réouverture progressive des économies conduit à la relance, et les habitudes de consommation alimentaire évolueront en conséquence. Le revenu des ménages est la clé. La reprise du marché de l’emploi a été forte ces derniers temps, mais elle pourrait s’essouffler au second semestre.
Les taux d’intérêt devraient rester bas jusqu’en 2022, selon les prévisions de la Banque du Canada. Le dollar canadien a gagné beaucoup de terrain par rapport au dollar américain depuis qu’il a atteint un plancher de 0,69 $ US en mars. Nous nous attendons à ce qu’il reste inférieur à 0,75 $ US en moyenne pour le reste de l’année. Ces tendances financières devraient soutenir les marges bénéficiaires des exploitations de céréales, d’oléagineux et de légumineuses.
Économiste supérieur
Craig Klemmer a commencé sa carrière à FAC en 2009 en tant qu’économiste agricole. Il se spécialise dans la surveillance et l’analyse de l’environnement macroéconomique, la modélisation de l’état de santé de l’industrie et la prestation d’analyses des risques liés à l’industrie. Avant son arrivée à FAC, il a travaillé à la Direction de l’élevage du ministère de l’Agriculture de la Saskatchewan. Craig est titulaire d’une maîtrise en agroéconomie de l’Université de la Saskatchewan.