Perspectives de 2023 pour le marché de l’équipement agricole
Les Services économiques FAC vous aident à comprendre les enjeux et les principales tendances économiques susceptibles d’avoir une incidence sur votre agroentreprise en 2023.
La demande globale d’équipement agricole devrait demeurer vigoureuse en 2023, malgré la hausse des taux d’intérêt et l’affaiblissement du taux de change $ CA/$ US. La demande est soutenue par de solides recettes monétaires agricoles, même si les prix des produits de base fléchissent par rapport aux sommets qu’ils avaient atteints. Les chaînes d’approvisionnement étant en voie de se rétablir, les fabricants d’équipement devraient accroître leurs livraisons de commandes de nouvel équipement. Toutefois, les stocks resteront inférieurs à leurs niveaux d’avant la pandémie, et, selon nos prévisions, ils pourraient même demeurer restreints jusqu’après 2024.
Prévisions de ventes
Les tendances des ventes devraient demeurer contrastées pour le reste de 2022. En glissement annuel, les ventes de tracteurs de grande puissance, de moissonneuses-batteuses et d’outillage devraient connaître une croissance positive, tandis que les ventes de tracteurs de faible puissance devraient diminuer en 2022 en raison de l’essoufflement de la croissance économique. Nous prévoyons une baisse des ventes d’équipement plus petit à l’heure où la conjoncture générale se détériore au Canada. Un ralentissement des ventes de tracteurs de faible puissance pourrait permettre aux fabricants de réorienter la production vers des tracteurs de forte puissance qui sont utilisés en agriculture. Des retards supplémentaires dans l’arrivée de l’équipement avant la fin de l’année pourraient modifier ces prévisions.
En 2023, les ventes de tracteurs de forte puissance, de moissonneuses-batteuses et d’outillage devraient augmenter grâce à des recettes élevées tirées des cultures :
Augmentation de 8,7 % des ventes de tracteurs de plus de 100 chevaux-puissance
Augmentation de 13,9 % des ventes de tracteurs à quatre roues motrices
Augmentation de 19,3 % des ventes de moissonneuses-batteuses
Augmentation de 32,2 % des ventes du secteur canadien de la fabrication de machines agricoles
Cependant, les ventes de tracteurs de faible puissance, qui dépendent en grande partie de la santé de l’économie canadienne, devraient ralentir en 2023 :
Diminution de 0,4 % des ventes de tracteurs de moins de 40 chevaux-puissance
Augmentation de 0,4 % des ventes de tracteurs de 40 à 100 chevaux-puissance
Toutefois, l’arrivée de l’équipement en provenance des fabricants demeure l’élément incertain des prévisions de ventes pour 2023. Les fabricants canadiens de machines agricoles se remettent toujours des perturbations des chaînes d’approvisionnement (figure 1). La forte demande d’équipement agricole depuis 2021 a réduit considérablement les stocks d’équipement neuf et d’occasion chez les concessionnaires, ouvrant ainsi d’autres possibilités d’augmenter les ventes des fabricants. Dans le secteur canadien de la fabrication de machines agricoles, les ventes ont progressé de 10 % en 2021 et affichent une hausse de 22,3 % pour les huit premiers mois de 2022. Elles devraient grimper de 32,2 % en 2023 en raison de la forte demande et de l’inflation des prix.
Figure 1 : Les chaînes d’approvisionnement s’améliorent, mais rien n’est encore réglé
Les stocks devraient demeurer restreints
Nous prévoyons que les niveaux de stocks demeureront restreints jusqu’à la fin de 2024, ce qui s’explique par la demande soutenue d’équipement agricole de la part des producteurs et par la nécessité pour les fabricants de se mettre à jour dans la livraison des précommandes. Les stocks d’équipement agricole neuf affichent une tendance à la baisse par rapport à la moyenne sur cinq ans (les stocks de tracteurs ont baissé de 42 % et ceux de moissonneuses-batteuses de 47 %). La forte demande d’équipement agricole pour le reste de 2022 devrait réduire davantage les niveaux de stocks et faire en sorte que les prix demeurent élevés. La bonne nouvelle est qu’on s’attend à ce que les fabricants d’équipement revoient leur production à la hausse en raison de l’évolution de l’environnement économique alors que les concessionnaires d’équipements d’Amérique du Nord commencent à reconstituer leurs stocks. Nous nous attendons à ce que les concessionnaires d’équipements agricoles continuent de vendre la totalité de leurs stocks d’équipement neuf. Cependant, les revenus individuels des concessionnaires demeurent incertains et liés aux livraisons provenant des fabricants et des quantités attribuées par ces derniers. Dans l’ensemble, les revenus de vente des concessionnaires dépendront du nombre de transactions qui se concrétiseront après l’arrivée de l’équipement neuf.
Les stocks de moissonneuses-batteuses devraient demeurer bas jusqu’en 2024
Les niveaux de stocks de tracteurs à quatre roues motrices devraient remonter lentement
Les niveaux de stocks de machines de faible puissance se rétablissent
Figure 2 : Les niveaux de stocks de machines de faible puissance se rétablissent
Figure 3 : Les niveaux de stocks de moissonneuses-batteuses et de tracteurs à quatre roues motrices devraient demeurer restreints
Prix de l’équipement
Les prix de l’équipement agricole devraient être plus élevés en 2023 en raison de la dépréciation du dollar canadien et des pressions inflationnistes dans la chaîne d’approvisionnement qu’on a pu observer au deuxième semestre de 2022. La valeur du huard a une incidence directe sur les prix de l’équipement. Puisque la plupart des moissonneuses-batteuses et tracteurs neufs vendus au Canada sont fabriqués au sud de la frontière, la dépréciation prévue du huard jusqu’à la fin de 2023 devrait faire grimper les prix de la machinerie agricole (figure 4). Dans le cas de l’équipement agricole fabriqué au Canada, notamment les perceuses et semoirs pneumatiques, le matériel aratoire, les chariots à grains, les andaineurs et les autres équipements spécialisés « à série restreinte », les prix sont moins directement liés à la valeur du dollar canadien.
Figure 4 : Les prix de l’équipement agricole devraient poursuivre leur tendance à la hausse
Répercussions sur le marché de l’équipement et des pièces d’occasion
Les perturbations des chaînes d’approvisionnement découlant des fermetures causées par la pandémie ont eu des répercussions directes sur la disponibilité des pièces et de l’équipement neufs. La planification stratégique des exploitations agricoles consistait à garder de l’équipement d’occasion supplémentaire à disposition advenant qu’il leur soit impossible d’obtenir des pièces et des services. Soit elles conservaient leurs vieilles machines, soit elles cherchaient de l’équipement d’occasion dans des ventes aux enchères. Les concessionnaires ont aussi modifié leur stratégie, privilégiant plutôt l’entretien et la remise en état de l’équipement d’occasion afin de permettre à leurs clients de continuer d’utiliser l’équipement qu’ils possèdent déjà pendant au moins une autre année. Cela a eu de profondes répercussions sur le marché de l’équipement d’occasion, dont les stocks ont chuté. Tout au long de l’exercice 2021-2022, l’équipement d’occasion (datant par exemple de quatre ou cinq ans) se vendait à des prix équivalents à ce qu’il valait deux ans auparavant.
Deux tendances financières importantes à surveiller en 2023
1. Taux d’intérêt
Les taux d’intérêt, qui avaient atteint des planchers historiques, ont augmenté tout au long de 2022, car la Banque du Canada a relevé son taux de financement à un jour, le portant de 0,25 % à 3,75 %. La Banque du Canada est déterminée à ramener l’inflation à son taux cible de 2 %. Par conséquent, les coûts d’emprunt devraient continuer à grimper en 2022 et peut-être au début de 2023. Dans certains cas, des exploitations agricoles ont vu leurs frais d’intérêt plus que doubler. Dans d’autres cas, une gestion prudente du risque financier a permis d’atténuer l’effet négatif des taux majorés sur les marges bénéficiaires. Historiquement, lorsque les taux d’intérêt augmentaient, les exploitants d’agroentreprises prolongeaient le cycle de remplacement de leur équipement et les ventes d’équipement agricole ralentissaient. Compte tenu des retards dans les livraisons d’équipement neuf et les faibles niveaux de stocks, nous prévoyons que la hausse des coûts d’emprunt n’influera pas sur la demande d’équipement agricole à court terme. Les revenus agricoles semblent suffisamment élevés pour compenser à court terme une augmentation des coûts des intrants et des frais liés aux taux d’intérêt.
2. Dollar canadien
Selon les prévisions actuelles des Services économiques FAC, le dollar canadien vaudra en moyenne 0,72 $ US jusqu’en 2023. Le déclin du huard entraînera des répercussions sur le marché de l’équipement d’occasion et celui de l’équipement neuf. La faiblesse du dollar canadien fera grimper les prix, ce qui forcera les concessionnaires à réévaluer leurs prix pour l’équipement d’occasion ou, du moins, à adapter leurs prix en dollars américains, en raison de la demande de la part des concessionnaires et agriculteurs des États-Unis.
Nous continuerons de surveiller ces deux tendances financières. Revenez-nous au début du mois de décembre pour la publication de notre prochaine Mise à jour trimestrielle sur l’économie et les marchés financiers alors que nous dévoilerons les plus récentes perspectives.
En conclusion
En 2023, le marché de l’équipement agricole sera marqué par une reprise des livraisons d’équipement neuf, alors que les chaînes d’approvisionnement se rétablissent lentement. De plus, toujours soutenue par les prix élevés des produits de base, la demande d’équipement agricole ne sera peut-être pas affaiblie à court terme par la hausse des taux d’intérêt et la dépréciation du dollar canadien. Nous nous attendons à ce que le marché de l’équipement d’occasion demeure vigoureux pendant la majeure partie de 2023 et 2024. La livraison d’équipement neuf, qui entraînera des transactions supplémentaires, et la lente reconstitution des stocks d’équipement neuf pourraient contribuer à modérer les prix sur le marché de l’équipement d’occasion. Les services et les pièces continueront d’être les principales sources de croissance des revenus des concessionnaires d’équipements canadiens, alors que les stocks d’équipement neuf et d’occasion se rétabliront.
Économiste principal
Fort de son expérience dans les marchés agricoles et la gestion du risque, Leigh Anderson est économiste principal à FAC. Il est spécialisé dans la surveillance et l’examen du portefeuille de FAC et de la santé de l’industrie, et il livre des analyses sur les risques liés à l’industrie. En plus de faire des présentations sur l’agriculture et l’économie, Leigh participe régulièrement au blogue des Services économiques de FAC.
Leigh est entré en fonction à FAC en 2015 au sein de l’équipe des Services économiques. Il œuvrait auparavant auprès de la Direction des politiques du ministère de l’Agriculture de la Saskatchewan. Il est titulaire d’une maîtrise en économie agricole de l’Université de la Saskatchewan.