L’amélioration des perspectives de rendement devrait stimuler les marges des producteurs de l’Est
La baisse des prix des cultures pose un défi pour les producteurs de céréales et d’oléagineux du Canada. Toutefois, l’amélioration des perspectives de rendement dans l’Est, par rapport à nos prévisions de janvier, laisse présager des marges positives dans cette région. Dans l’Ouest, les nombreuses variations régionales au chapitre des rendements estimés indiquent que nos prévisions de janvier concernant la faiblesse des marges restent en grande partie inchangées.
Stabilisation des prix du maïs, légère hausse des prix du blé et baisse des prix du soya pour l’année commerciale 2024-2025
Cette amélioration des prévisions concernant les marges ne découlera toutefois pas d’une amélioration des prix pour l’année. En effet, depuis janvier, les prévisions de prix des Services économiques FAC continuent de tendre généralement à la baisse pour les principales cultures. Les prix du maïs et du blé resteront proches du niveau le plus bas observé au cours des quatre dernières années. Les prix du soya continueront à baisser par rapport au sommet atteint en février 2023, et ce, jusqu’à la fin de l’année 2024 (figure 1).
Figure 1 : Les prix des cultures en 2024 subissent la pression exercée par l’affaiblissement de la demande mondiale et les stocks abondants
Ces prix reflètent les attentes relatives aux approvisionnements mondiaux. Dans son dernier rapport WASDE, le département américain de l’Agriculture (USDA) a révisé à la hausse ses prévisions concernant la production mondiale de blé et les stocks de fin d’année pour 2024-2025, en raison de l’amélioration des conditions en juin dans de nombreux pays, dont le Canada et les États-Unis. Néanmoins, les stocks de fin d’année sont inférieurs à ceux des campagnes 2022-2023 et 2023-2024, ce qui contribue à empêcher les prix du blé de chuter davantage. La production mondiale de soya devrait augmenter de 7 % d’une année sur l’autre au cours de la présente année commerciale, et les stocks de fin d’année devraient bondir de pas moins de 19 %. La production de maïs et les stocks de fin d’année devraient être conformes aux niveaux de 2023, malgré les baisses enregistrées en Russie après une période de conditions météorologiques défavorables. Cependant, les résultats définitifs de la récolte dans la région de la mer Noire constituent un important facteur d’incertitude dans ces estimations. La Russie et l’Ukraine ont toutes deux été confrontées à des déficits hydriques extrêmes, et de faibles rendements seront bénéfiques pour les prix.
Les pluies printanières abondantes donnent un coup de pouce aux cultures agricoles canadiennes
Nous prévoyons que l’augmentation de la production (par rapport aux estimations initiales) compensera largement l’impact de la baisse des prix, ce qui aura pour effet d’accroître les marges dans l’Est du Canada. Les prévisions de rendement, en particulier, se sont améliorées grâce aux taux d’humidité suffisants enregistrés au printemps. Par conséquent, pour le reste de l’année 2024, nous prévoyons un raffermissement de la rentabilité du soya et du maïs.
Les dernières estimations de production d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) montrent que la production totale de blé canadien augmentera en glissement annuel en 2024 (figure 2). La production de soya, de canola et de maïs devrait désormais être stable en glissement annuel, alors qu’on prévoyait auparavant des baisses sur douze mois. Les estimations pour chaque culture, à l’exception du maïs, ont été relevées de 2 à 3 % depuis la publication du rapport d’AAC en juin.
Figure 2 : Augmentation de la production canadienne de blé en 2024-2025; les autres grandes cultures ne progressent pas vraiment en glissement annuel
Ces prévisions ont été formulées avant que les dernières données n’indiquent des baisses attendues dans les estimations de rendement pour les cultures du Manitoba et de l’Alberta, ce qui pourrait se traduire par de nouvelles révisions à la baisse des prévisions concernant la production dans le prochain rapport d’AAC. Cela dit, les estimations de rendement pour l’Ouest canadien ont toutes augmenté depuis les estimations formulées avant la saison et au début de celle-ci. En février, la totalité de l’Ouest canadien était aux prises avec le type de temps sec qui est étroitement lié à des baisses de rendement en septembre. Mais entre mars et juin, les niveaux d’humidité se sont améliorés presque partout; dans certaines régions, la saturation du sol a même empêché un ensemencement normal. Par rapport à leur moyenne quinquennale respective, l’équipe des Services économiques FAC prévoit que les rendements du canola et du blé seront inférieurs de 0,4 % au Manitoba, supérieurs de 7,4 % en Saskatchewan et inférieurs de 3,2 % en Alberta. En Ontario et au Québec, les rendements du maïs et du soya seront respectivement supérieurs de 4,9 % et de 6,7 % à leurs moyennes sur cinq ans (figure 3).
Figure 3 : Rendements estimés pour 2024-2025 par rapport à la moyenne sur cinq ans
Les conditions météorologiques variables enregistrées dans l’Ouest depuis le début de la campagne agricole 2024-2025 ont donné lieu à des conditions de sécheresse historiques au début du printemps, à un excès d’humidité à la fin du printemps, et à des conditions à nouveau trop sèches à la fin du mois de juillet. Dans l’ensemble, cela signifie que les rendements pourraient évoluer à peu près au même rythme que la moyenne des cinq dernières années.
À mi-parcours de la campagne agricole, les conditions montrent une certaine faiblesse
Fin juillet, les conditions commencent à montrer une certaine faiblesse au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta, bien que les cultures aient atteint des niveaux impressionnants. L’indice de végétation par différence normalisée (figure 4) [en anglais seulement] mesure la densité de la végétation à l’aide de l’imagerie satellite. Des valeurs élevées indiquent une grande densité de végétation ou de meilleurs profils de croissance. Toutefois, la forme de la courbe est tout aussi importante. Une fois les cultures levées, un juste équilibre entre chaleur et pluie est nécessaire pour permettre une floraison optimale des végétaux. La ligne bleu marine de la figure 4 montre la trajectoire de la croissance des végétaux en 2013, dernière année où l’Ouest canadien a enregistré une récolte exceptionnelle, avec une longue courbe de valeurs élevées tout au long des mois d’été. Cela indique qu’il n’y a eu aucun stress durant la période de floraison.
Le graphique montre la possibilité que cette récolte s’avère exceptionnelle en 2024 avec un pic élevé dans la courbe. La courbe ayant atteint un sommet au début du mois de juillet, son déclin donne à penser que les cultures commencent à manquer d’humidité, de vastes portions des Prairies étant confrontées à du temps très chaud et sec pendant la floraison à l’approche du mois d’août.
Figure 4 : Plus de pluie et moins de chaleur sont maintenant nécessaires pour maintenir les estimations de rendement élevées
En conclusion
Dans le contexte actuel où les cultures risquent de perdre des fleurs dans certaines régions en raison du temps sec, il est difficile de prévoir les rendements. Mais on peut dire sans se tromper que, pour les cultures de l’Ouest et de l’Est, les perspectives de rendement sont meilleures qu’en janvier, mais moins bonnes qu’en juin, après l’ensemencement. Nos prévisions montrent un raffermissement des marges par rapport à nos perspectives de janvier pour le canola, le blé, le soya et le maïs.
À ce stade-ci de la campagne 2024-2025, de la pluie est nécessaire pour terminer la culture. Mais grâce à un début d’année particulièrement favorable, la situation globale devrait être meilleure qu’en 2023, année où un bon départ avait été gâché par un manque de pluie durant la saison.
Rédactrice économique
Membre de l’équipe des Services économiques depuis 2013, Martha Roberts est une spécialiste en recherche qui étudie les risques et les facteurs de réussite pour les producteurs agricoles et les agroentreprises. Martha compte 25 années d’expérience dans la réalisation de recherches qualitatives et quantitatives et la communication des résultats aux spécialistes de l’industrie. Elle est titulaire d’une maîtrise en sociologie de l’Université Queen’s à Kingston, en Ontario, et d’une maîtrise en beaux-arts en écriture non fictive de l’Université de King’s College.