Les possibilités liées à l’agriculture autochtone pourraient accroître le PIB de 1,5 milliard de dollars
Le lien entre les peuples autochtones et l’agriculture ne date pas d’hier, et pourtant, les Autochtones demeurent sous-représentés dans ce domaine. Accroître la participation des peuples autochtones à l’agriculture et combler l’écart entre les revenus agricoles des exploitations autochtones et non autochtones permettrait d’augmenter de 1,5 milliard de dollars le PIB de l’agriculture primaire. Les nouveaux efforts déployés pour réduire les obstacles qui bloquent l’accès au capital, à l’équipement et à la main-d’œuvre qualifiée, ainsi qu’à des connaissances et à des méthodes agricoles, sont autant de moyens de stimuler la production agricole autochtone, de promouvoir la santé des Autochtones, d’accroître la sécurité alimentaire et de favoriser la santé et la résilience de l’économie canadienne.
La population autochtone demeure sous-représentée en agriculture
Les données de Statistique Canada suggèrent que la population autochtone est encore aux prises avec des disparités économiques importantes et persistantes par rapport à la population non autochtone au Canada.
Au recensement de 2021, plus de 1,8 million de personnes se sont identifiées comme autochtones, soit 5 % de la population totale du Canada. Dans le secteur de l’agriculture, le Canada comptait 5 405 exploitants agricoles autochtones sur 262 045 exploitants agricoles (2,1 %). Bien que cela représente une hausse de 5 % de la participation par rapport au recensement précédent, il reste de vastes occasions d’accroître cette participation. Les exploitants agricoles autochtones vivent dans l’ensemble des provinces et des territoires, les quatre provinces de l’Ouest abritant plus de 70 % d’entre eux. La Saskatchewan compte le plus grand nombre d’exploitants autochtones, soit 1 165 (21,6 %), suivie de l’Alberta à 1 130 (20,9 %). Les exploitations agricoles autochtones sont plus nombreuses dans les secteurs des oléagineux et des céréales, des légumes, des fruits et d’autres cultures, y compris la production en serre, puis dans l’élevage de bovins.
Une représentation équitable de la population autochtone en agriculture supposerait une augmentation du nombre d’exploitants agricoles autochtones jusqu’à un niveau similaire à leur contribution à la population canadienne totale, soit en accueillant 7 631 exploitants agricoles supplémentaires dans l’économie agricole, une augmentation de 140 %.
Combler l’écart entre les revenus agricoles des exploitations autochtones et non autochtones
Il ne faut pas sous-estimer l’impact des injustices historiques sur les peuples autochtones. Les répercussions générationnelles persistantes de la Loi sur les Indiens, des pensionnats, de la rafle des années 1960 et d’autres facteurs contribuent à des différences économiques significatives et durables entre les populations autochtones et non autochtones du Canada. Le manque d’accès au capital, les taux inférieurs de participation des Autochtones à la population active, l’accès à l’éducation, le niveau de scolarité atteint ainsi que le taux de chômage plus élevé sont autant de facteurs majeurs qui continuent de gêner les progrès économiques des Autochtones en général, et dans l’économie agricole en particulier.
Selon Statistique Canada, le revenu d’exploitation médian des entreprises agricoles autochtones était de 25 960 $ en 2020, contre 73 440 $ pour les exploitants non autochtones. Cela équivaut à un écart de revenus de 47 480 $, soit près de 65 %. Cet écart a légèrement diminué entre 2015 et 2020, puisqu’il se chiffrait à 49 900 $ (montant ajusté en fonction de l’inflation) en 2015. L’inégalité des revenus a donc légèrement diminué au cours des cinq dernières années.
Ces différences sont en grande partie attribuables à la sous-représentation des exploitants agricoles autochtones dans les tranches de revenus supérieures. Les exploitants autochtones sont fortement représentés dans les tranches inférieures (figure 1), 60 % d’entre eux gagnant moins de 50 000 $ par année, par rapport à 43 % des exploitants non autochtones. Ces chiffres suggèrent que la plupart travaillent à petite échelle, bien que certains exploitants autochtones possèdent de grandes exploitations agricoles.
Figure 1 : Catégorie de revenus des exploitants agricoles autochtones et non autochtones
La réduction de l’écart entre les revenus des exploitations agricoles autochtones et non autochtones peut être convertie en une contribution à l’économie mesurée en termes de PIB. On estime qu’en 2021, le PIB lié aux exploitations autochtones d’agriculture primaire s’établissait à 351 millions de dollars, soit 1,0 % du PIB de l’agriculture primaire du Canada. Par comparaison, la contribution au PIB des exploitations agricoles non autochtones s’élevait à 35,9 milliards de dollars. Le PIB estimatif de l’agriculture primaire par exploitant agricole était de 64 900 $ pour les Autochtones et de 140 100 $ pour les non-Autochtones, ce qui représente un écart du PIB par exploitation de 75 200 $.
Potentiel de croissance de la représentation et des revenus des Autochtones
Une représentation équitable de l’agriculture autochtone suppose une hausse du nombre d’exploitants ainsi que des revenus générés par exploitation.
Le tableau 1 résume l’incidence, sur le PIB agricole des Autochtones et du Canada, d’une hausse de la participation autochtone dans le secteur et des revenus générés par exploitation. L’atteinte de ces objectifs permettrait d’augmenter le PIB de l’agriculture primaire canadienne de 1,5 milliard de dollars.
Tableau 1 : Potentiel de croissance du PIB de l’agriculture autochtone
Une occasion favorable à l’ensemble de l’économie
Les efforts déployés pour que les peuples autochtones du Canada atteignent la parité économique constituent une occasion de rehausser la résilience économique des populations autochtones et de favoriser la sécurité alimentaire. La participation accrue des Autochtones à l’agriculture présente un potentiel de 1,5 milliard de dollars qui ferait plus que quadrupler le PIB de l’agriculture autochtone et donnerait un coup de pouce estimé à 4,0 % au PIB de l’agriculture primaire du Canada. Les programmes gouvernementaux comme l’initiative sur les systèmes agricoles et alimentaires autochtones et les programmes de financement destinés aux communautés et aux organisations autochtones et nordiques sont louables et pourraient être bonifiés en mettant en place un plan d’innovation [en anglais seulement] et en favorisant la collaboration entre toutes les parties prenantes afin d’éliminer les obstacles à une participation accrue des Autochtones à l’agriculture primaire et aux entreprises agroalimentaires.
Économiste principal
En tant qu’économiste principal à FAC, Isaac Kwarteng se concentre sur la recherche et les prévisions économiques à long terme, en soutien à la stratégie et à la gestion du risque. De plus, il appuie le bureau de la PDG en répondant aux demandes de renseignements et de données.
M. Kwarteng est entré au service de FAC en 2023. Auparavant, il a occupé des fonctions touchant l’économie, la recherche et la statistique pour le gouvernement de la Saskatchewan pendant une décennie.
Titulaire d’une maîtrise en économie de l’Université d’East Anglia, au Royaume-Uni, il détient aussi une maîtrise en statistique de l’Université de Regina, où il est actuellement inscrit au programme de doctorat.