Principales tendances économiques de 2018 : La valeur des terres agricoles
En ce début d’année, l’équipe de l’Économie agricole de FAC souhaite vous présenter cinq tendances économiques qui influenceront probablement l’industrie agroalimentaire canadienne cette année.
L’évolution de la valeur des terres agricoles est la deuxième des cinq tendances importantes à surveiller en 2018. La valeur des terres agricoles devrait continuer d’augmenter, mais, comme ce fut le cas au cours des deux dernières années, elle progressera à un rythme moindre. Cette situation peut sembler préoccupante, mais une baisse du taux d’appréciation de la valeur des terres est logique. Elle reflète une période où nous prévoyons que les recettes des cultures subiront une pression attribuable à une offre croissante de produits de base et que les taux d’intérêt grimperont.
L’année 2018 commence avec un bilan solide
Les terres agricoles représentaient 68 % de l’actif agricole total du Canada en 2016 (les plus récentes données disponibles). Les terres agricoles, à titre de proportion de l’actif total, ont connu une progression de leur valeur au cours des dernières années, après avoir enregistré chaque année des hausses importantes de prix. La solidité du bilan de l’agriculture canadienne a été soutenue par des recettes qui ont atteint des niveaux record en 2016, notamment en ce qui concerne les céréales et oléagineux.
L’équilibre entre l’offre et la demande détermine le prix des céréales et oléagineux
Nous croyons que le même lien robuste qui existe entre les recettes et la valeur des terres agricoles se maintiendra en 2018. Les taux d’intérêt et les recettes monétaires agricoles – mais surtout les recettes des cultures – dictent l’évolution de la valeur des terres agricoles. Les recettes monétaires agricoles totales, qui devraient croître de 3,1 % en 2018, continueront de soutenir la valeur des terres agricoles canadiennes au cours de la prochaine année.
Par contre, l’abondance des stocks de fin d’année, conséquence de la production record de plusieurs produits de base, a fortement ralenti le marché depuis 2015. En l’absence de perturbations liées aux conditions météorologiques, les principaux marchés agricoles devraient rester saturés en 2018. En 2017-2018, la production mondiale d’oléagineux enregistrera une sixième année consécutive de forte croissance. Même si l’on tient compte des quelques conditions météorologiques difficiles qu’a connu le Canada en 2017, la production a augmenté. Ainsi, le maïs, le soja et le canola ont crû respectivement de 7 %, 18 % et 9 % par rapport à 2016.
Dans ce contexte, il n’est pas étonnant que des pressions s’exercent sur les prix de nombreux produits de base. En fait, une progression moins rapide des recettes et de la valeur des terres agricoles canadiennes aurait pu survenir plus tôt, sans la vigueur de la demande sur les marchés mondiaux et la faiblesse du huard qui ont protégé les producteurs canadiens des prix des produits de base qui sont demeurés sous leur moyenne robuste de cinq ans. Une économie mondiale saine continuera de modérer les prix en 2018, et nous prévoyons que le huard se situera en moyenne à 0,78 $ US, ce qui permettra de soutenir les marges des producteurs de cultures en 2018.
Composer avec une remontée des taux d’intérêt
L’évolution des taux d’intérêt limitera également la croissance de la valeur des terres agricoles en 2018. Les taux d’intérêt, qui ont amorcé une tendance à la hausse depuis la fin de 2017, devraient encore grimper en 2018, mais nous ignorons toutefois à quel moment. L’inflation demeure faible, mais avec la diminution du taux de chômage, la progression de l’emploi favorisera l’augmentation des salaires et, par le fait même, une hausse de l’inflation.
En 2018, nous prévoyons deux hausses de 25 points de base du taux de financement à un jour de la Banque du Canada, qui seront mises en place progressivement. L’augmentation des coûts d’emprunt limitera ce que les acheteurs potentiels peuvent se permettre sur le marché des terres agricoles.
Que faut-il retenir?
Les terres agricoles représentent habituellement l’actif le plus important des producteurs. Les terres sont souvent acquises grâce à l’emprunt – qui doit être remboursé au moyen d’une augmentation des recettes agricoles. Une hausse de la valeur des terres agricoles ne permet de renforcer le secteur que si elle coïncide avec une hausse proportionnelle des recettes. C’est ce qui explique la vigueur de l’économie agricole du Canada au cours de la dernière décennie, vigueur qui devrait se maintenir tout au long de 2018.
Certains obstacles pourraient toutefois se dessiner à l’horizon. Les importants volumes de production dans les grandes régions de production de cultures pourraient entraîner une variation des prix et par conséquent, des recettes canadiennes. Une hausse du dollar canadien supérieure aux prévisions pour 2018 pourrait également faire baisser le revenu. Une remontée des taux d’intérêt se traduit par une hausse des coûts. Notre conseil? Surveillez ces pressions et planifiez.
Vice-président exécutif, Stratégie et Impact et économiste en chef
Jean-Philippe est Vice-président exécutif, Stratégie et Impact et économiste en chef à FAC. Il offre des conseils qui aident à orienter la stratégie de FAC et qui servent à identifier les risques et opportunités dans l’environnement d’affaires. En plus d’agir comme porte-parole de FAC pour des questions économiques, Jean-Philippe offre ses commentaires sur l'industrie agricole et agroalimentaire dans des vidéos et le blogue des Services économiques FAC.
Avant de se joindre à FAC en 2010, Jean-Philippe était professeur d’agroéconomie à l’Université North Carolina State et à l’Université Laval. Jean-Philippe détient le titre de Fellow de la Société canadienne d’agroéconomie. Il a obtenu son doctorat en économique de l’Université d’Iowa State en 1999.