Rapport 2023 sur le secteur des aliments et des boissons : bilan semestriel
Six mois après avoir publié notre Rapport 2023 sur le secteur des aliments et des boissons, nous examinons les résultats que les fabricants de produits alimentaires et de boissons ont obtenus jusqu’ici, nous présentons nos prévisions pour le reste de l’année 2023 et le début de 2024, et nous donnons un aperçu des tendances à surveiller au cours des prochains mois.
Mise à jour sur les ventes
Les données sur les ventes enregistrées au cours du premier semestre de 2023 ont été stables; on constate une hausse de 8,4 % pour le secteur de la fabrication de produits alimentaires et une hausse de 7,3 % pour le secteur de la fabrication de boissons comparativement à la même période en 2022 (tableau 1).
Tableau 1 : Les ventes du secteur de la fabrication de produits alimentaires ont augmenté pendant le premier semestre de 2023, mais la croissance est susceptible de ralentir au deuxième semestre
Il s’agit ici des ventes nominales; ces données ne tiennent pas compte de l’inflation. La croissance des ventes nominales est largement attribuable à l’augmentation des prix de vente moyens dans le secteur de la fabrication de produits alimentaires, mesurée par l’Indice des prix des produits industriels (IPPI). Les prix de vente des fabricants de boissons ont affiché une croissance de plus de 10 % en glissement annuel pendant des mois, jusqu’en août. Au contraire, les prix de vente dans le secteur de la fabrication de produits alimentaires, qui ont grimpé en flèche pendant la pandémie en raison de la demande accrue et des coûts élevés des intrants, affichent depuis quelque temps une croissance ralentie; en août, les prix ont augmenté de seulement 2,5 % en glissement annuel, soit le taux de croissance le plus bas en plus de deux ans. Si l’on tient compte de l’inflation, la croissance des prix de vente durant le premier semestre a été de 1,0 % pour les fabricants de produits alimentaires et de ‑2,6 % pour les fabricants de boissons.
Figure 1 : Les prix de vente diminuent dans le secteur de la fabrication de produits alimentaires, mais ils demeurent élevés dans le secteur de la fabrication de boissons
Compte tenu de la forte croissance des ventes nominales durant le premier semestre, nous prévoyons que les ventes totales du secteur de la fabrication de produits alimentaires et de boissons pour 2023 s’établiront à 164 milliards de dollars (une croissance de 5,4 %). Par comparaison, nous avions prévu une croissance estimative de 2,2 % dans le Rapport sur le secteur des aliments et des boissons.
Les secteurs de la fabrication de produits alimentaires et de boissons sont diversifiés, comme en témoignent les chiffres présentés dans le tableau 1. Si plusieurs secteurs ont vu leurs ventes augmenter de plus 10 %, comme indiqué ci-dessus, une grande partie de cette croissance est attribuable à la hausse des prix. Les ventes du secteur de la mouture de céréales et d’oléagineux devraient diminuer au deuxième semestre de 2023 et au premier semestre de 2024 en raison d’une baisse des prix du blé et du canola par rapport aux sommets atteints en 2022. Les ventes des établissements vinicoles sont en baisse, mais il convient de souligner que ce secteur a connu un mini-boum au chapitre des ventes durant la pandémie (taux de croissance respectifs de 25 % et de 32 % en 2020 et en 2021). On prévoit toujours que les ventes des établissements vinicoles en 2023 seront supérieures de 40 % à celles de 2019; cette croissance est principalement attribuable à l’augmentation des volumes, les prix de vente des fabricants n’ayant augmenté que de 14 %.
Diminution des marges attendue en 2023
Les marges des fabricants de produits alimentaires et de boissons sont sous pression depuis 2019, et 2023 ne fera pas exception. Si les marges étaient comprimées en 2021 et au début de 2022 en raison de la hausse des coûts des intrants, c’est maintenant la demande qui pèse sur les marges. En effet, les dépenses de consommation réelles diminuent en raison de l’inflation accrue. Les marges du secteur de la fabrication de boissons seront plus touchées que celles du secteur de la fabrication de produits alimentaires; elles sont presque 50 % plus basses que celles de notre année de référence [2019] (figure 2). Il est à noter que les marges peuvent varier considérablement d’un secteur à l’autre.
Figure 2 : Les marges brutes du secteur de la fabrication de produits alimentaires et de boissons sont sous pression en 2023
Tendances à surveiller
Assouplissement du marché du travail
Le taux d’emplois vacants (soit le nombre d’emplois vacants en pourcentage de la demande de main‑d’œuvre) pour les grossistes en alimentation, les fabricants de produits alimentaires et les entreprises de services alimentaires a diminué depuis 2021-2022, et les taux pour les grossistes en alimentation et les fabricants de produits alimentaires correspondent à peu près aux moyennes antérieures à la pandémie. Ces baisses résultent de la dotation des postes vacants, du fait que les entreprises ne cherchent plus à embaucher autant qu’avant, ou d’une combinaison de ces deux facteurs.
Figure 3 : Les taux d’emplois vacants dans les principaux secteurs de l’alimentation sont en baisse
La croissance des salaires demeure un problème pour les employeurs. Pour les fabricants de produits alimentaires, l’augmentation annuelle moyenne des salaires hebdomadaires des employés entre 2015 et 2019 a été de 0,8 % par année, mais au cours des deux dernières années, les salaires hebdomadaires moyens ont crû de 4,6 % par année. Les taux d’emplois vacants et la croissance des salaires sont en corrélation, de sorte qu’une baisse du taux d’emplois vacants devrait freiner la croissance des salaires.
Demande dans le secteur des services alimentaires
Il aura fallu un certain temps, mais vers le début de l’année 2023, les dépenses réelles (c.-à-d. rajustées en fonction de l’inflation) consacrées aux services alimentaires se sont rétablies à leurs niveaux antérieurs à la pandémie (figure 4). S’il s’agit d’un signe positif, les dépenses sont nettement inférieures à la tendance antérieure à la pandémie (de 2009 à 2019).
Compte tenu du ralentissement économique en cours et des répercussions négatives probables sur le marché du travail, ce type de dépenses discrétionnaires aura du mal à croître. Elles pourraient même se contracter si le ralentissement dégénère en récession. Un coup d’œil sur les années passées peut nous aider à comprendre ce qui se passe actuellement. La récession de 2020 n’est pas très utile aux fins de cette analyse, étant donné que les confinements ont entraîné un effondrement des ventes du secteur des services alimentaires. Toutefois, durant la récession de 2008-2009, nous avons assisté à une baisse de 4,6 % des ventes du secteur des services alimentaires.
Figure 4 : Les ventes du secteur des services alimentaires, rajustées en fonction de l’inflation, se sont rétablies aux niveaux antérieurs à la pandémie, mais elles sont inférieures aux tendances observées avant la pandémie
Ralentissement de la croissance économique mondiale
Les exportations demeurent vigoureuses en 2023, mais elles ont diminué par rapport à celles des deux dernières années. Durant le premier semestre de 2023, les exportations du secteur de la fabrication de produits alimentaires ont crû de 8,8 % en glissement annuel après des hausses marquées de 14,6 % en 2022 et de 17,1 % en 2021. Un ralentissement sur le marché mondial — en particulier aux États-Unis, plus important partenaire commercial du Canada pour les échanges de produits agroalimentaires — aura une incidence sur les possibilités de vente à l’exportation.
Économiste principal
Graeme Crosbie est économiste principal à FAC. Ses domaines d’intérêt portent notamment sur l’analyse et les perspectives macroéconomiques et sur l’analyse et la surveillance de l’industrie agroalimentaire canadienne. Ayant grandi sur une ferme laitière dans le sud de la Saskatchewan, il formule à l’occasion des observations sur la santé de l’industrie laitière du Canada.
Graeme est employé à FAC depuis 2013 et a consacré la plus grande partie de ces années à la gestion du risque. Il détient une maîtrise en gestion avec spécialisation en économie financière de l’Université de Cardiff ainsi que le titre d’analyste financier agréé (CFA).