Le sommeil, c’est sérieux
Quand la psychothérapeute ontarienne Bonnie Taylor, M.S.S, T.S., s’assoit avec un client ou une cliente qui peine à accomplir ses tâches, manque de motivation et présente des signes d’anxiété ou de dépression, la première question qu’elle pose est : « Dormez-vous suffisamment? ».
L’idée selon laquelle le sommeil est un luxe plutôt qu’une nécessité peut entraîner de graves problèmes.Il n’est pas rare que les exploitants agricoles brûlent la chandelle par les deux bouts, particulièrement durant les périodes les plus occupées. Toutefois, l’idée selon laquelle le sommeil est un luxe plutôt qu’une nécessité peut entraîner de graves problèmes à court et à long terme.
« La quantité et la qualité de notre sommeil peuvent avoir d’importantes répercussions sur notre santé physique et mentale, affirme Mme Taylor. Bon nombre de mes clients agriculteurs ne tiennent pas compte de la durée de leur sommeil. Certains déclarent dormir huit heures par nuit, mais admettent qu’il leur faut du temps pour s’endormir, que leur sommeil est souvent agité et qu’ils se réveillent plusieurs fois par nuit, le cerveau en ébullition. »
Ce problème découle en partie d’une mentalité profondément enracinée qui valorise de longues heures de travail et une productivité surhumaine. Ainsi, dans certains cas, les exploitants agricoles choisissent de continuer à travailler toute la nuit pour terminer leurs tâches aux champs avant que la pluie tombe au lieu de dormir convenablement.
S’il peut parfois s’agir de la bonne décision, compromettre son sommeil n’est pas une option viable et soulève des inquiétudes concernant la sécurité au travail, l’efficacité et la capacité à prendre des décisions éclairées. Des études montrent que demeurer éveillé pendant 17 heures équivaudrait à un taux d’alcool dans le sang de 0,05 %. De façon similaire, ne pas dormir pendant 24 heures aurait les mêmes effets qu’une alcoolémie de 0,10 %.
Les habitudes de sommeil
Quand on est conscient de ses habitudes de sommeil, il est plus facile de les changer graduellement. Souvent, la conjointe ou le conjoint sait si les habitudes de sommeil de son ou sa partenaire changent. Ronfler de façon excessive ou se réveiller brusquement et avoir l’impression de manquer d’air peuvent être des symptômes d’apnée du sommeil dont il vaut mieux discuter avec un médecin ou un spécialiste d’une clinique du sommeil. Santé Canada recommande aux adultes de dormir de sept à neuf heures par jour; or, un adulte sur trois âgé de 35 à 64 ans n’atteint pas ce seuil.
Qu’est-ce que l’hygiène du sommeil?
Les parents savent que le fait de suivre une routine à l’heure du coucher aide les enfants à adopter des habitudes de sommeil saines et durables. Il en va de même pour les adultes. Voici quelques pratiques simples pour avoir une bonne hygiène du sommeil :
Faites le vide dans votre esprit avec un peu de lecture légère.
Prenez le temps de noter le problème et quelques pistes de solutions si des pensées envahissantes vous empêchent de dormir; coucher ce qui nous stresse sur papier peut aider à faire taire les inquiétudes qui rendent le sommeil difficile.
Surveillez votre consommation de caféine et d’alcool et fixez-vous une heure limite pour en prendre. Évitez la caféine huit heures avant d’aller au lit et l’alcool quatre heures avant le coucher.
Créez un environnement de sommeil qui favorise l’endormissement. Il doit s’agir d’un endroit frais, sombre et calme.
Pratiquez une activité physique, mais modérément, et pas juste avant de dormir.
Certaines mesures peuvent également favoriser une bonne nuit de sommeil. « Une longue journée à faire fonctionner des équipements bruyants peut être trop stimulante; prévoyez un moment de calme quand vous rentrez à la maison après le travail. Même 20 minutes de détente sans bruit ni écran peuvent vous apaiser et vous aider à réduire votre niveau de stress. »
Mme Taylor conseille également d’effectuer un balayage corporel pour prendre conscience de ses tensions. « Évaluez le niveau de tension ou de raideur dans vos épaules. Votre cou est-il rigide et peu flexible? Serrez-vous inconsciemment les poings ou la mâchoire? Prendre conscience des tensions physiques qui nous habitent facilite leur soulagement. Essayer de dormir avec un corps qui se crispe n’est pas optimal. »
Les effets d’un sommeil de mauvaise qualité
Parfois, les exploitants agricoles se disent que s’ils travaillent toute la nuit, ils pourront rattraper leur sommeil lorsqu’il pleuvra ou le dimanche. Mais dormir, ce n’est pas comme un compte bancaire : on ne peut pas retirer et déposer du temps de sommeil. Le manque de sommeil peut avoir un prix.
« À court terme, le manque de sommeil influe sur la mémoire, l’aptitude à prendre des décisions et même sur le temps de réaction physique. Il entraîne des effets semblables à ceux causés par l’alcool ou les drogues. Il n’est pas possible d’être présent, concentré ou mentalement alerte si notre corps et notre cerveau sont en manque de sommeil », explique Mme Taylor.
« À long terme, une carence en sommeil peut exacerber des problèmes médicaux plus graves comme les maladies cardiaques, les accidents vasculaires cérébraux et l’obésité; elle est aussi susceptible d’occasionner des blessures. Un sommeil insuffisant peut aussi accroître les symptômes de maladie mentale tels que l’anxiété et la dépression. Le corps et l’esprit ont besoin de sommeil pour récupérer. »
Qu’en est-il des siestes?
Se reposer pendant la journée peut être réparateur si l’on manque un peu de sommeil. « Certaines personnes sont très somnolentes après une sieste, tandis que d’autres se sentent revigorées. Il est préférable qu’une sieste soit courte, c’est-à-dire pas plus de 20 minutes. Évitez aussi de vous assoupir en fin de journée. Cela peut nuire à votre capacité à vous endormir », ajoute Mme Taylor.
Autres pratiques utiles
« Faire une pause de cinq minutes plusieurs fois par jour pour méditer, s’étirer, échanger avec les autres, utiliser une application de relaxation ou simplement profiter de la nature environnante peut aider à désamorcer le stress et la tension, et ainsi éviter qu’ils atteignent un niveau qui nuit à la détente et au sommeil », conclut-elle.
Par ailleurs, l’instauration d’une culture d’entreprise qui reconnaît l’importance du sommeil pour tous les membres de l’équipe devrait être une priorité. Il s’agit d’un élément essentiel pour garantir que le travail est effectué correctement et en toute sécurité.
D’après un article de l’AgriSuccès par Peter Gredig.