Une productrice de Kelowna embrasse le changement
Au cours des 20 dernières années, Andrea McFadden a modifié sa stratégie d’affaires à plusieurs reprises afin de rentabiliser son exploitation de huit acres située à Kelowna. Cette entrepreneure, une grande amoureuse des plantes de son propre aveu, cultive actuellement 60 variétés de lavande, plus de 120 rosiers de Damas et une dizaine de plantes aromatiques destinés à trois usages distincts : le marché culinaire, la production de semences et la distillation sur place – les huiles essentielles et les hydrolats* qu’elle produit sont d’ailleurs vendus ou employés dans des produits fabriqués à la ferme.
Malgré les hauts et les bas, Andrea demeure enthousiaste quant à l’avenir de son entreprise, Okanagan Lavender and Herb Farm, et est ravie de faire part des leçons qu’elle a apprises au fil du temps.
Faire preuve de résilience
En 1908, mon grand-père a fondé une pépinière qui a eu du succès dans la région. Mon père était passionné par la production de raisins. Lui et mon frère ont produit le premier vin de la famille en 1989, donnant ainsi naissance à la vinerie Quails’ Gate, que mon autre frère dirige actuellement. Après la naissance de mes enfants, j’ai pris la décision de quitter l’enseignement pour me consacrer à l’agriculture.
Le verger vieillissant dépérissait et j’ai décidé d’y planter des vignes. Malheureusement, juste au moment où elles commençaient à bien produire, un gel meurtrier a tout ravagé, sauf le peu de lavande que j’avais planté à titre expérimental. D’ailleurs, j’expérimente constamment, car je suis fascinée par les plantes dont les vertus sont reconnues traditionnellement, comme la lavande qui a des propriétés anti-inflammatoires. Lorsque j’ai vu que la lavande avait survécu au gel, je me suis dit : « il y a peut-être là un débouché », et j’en ai planté davantage.
L’importance de la créativité et d’une attitude positive face au changement
J’aime aussi apprendre et créer. C’est ce qui m’a amené à concevoir nos produits.
J’ai toujours cru que le changement est une bonne chose. On peut obtenir une récolte abondante d’une plante une année, mais l’année suivante, on n’en récolte pas assez pour fabriquer un produit. Cela fait partie de l’agriculture. Je suis capable de voir différentes perspectives et possibilités. Les gens seraient stupéfaits d’entendre toutes les idées que j’ai en tête. En revanche, il est important de garder sa concentration et de se demander : « Est-ce une bonne idée pour mon entreprise? ».
J’aime aussi apprendre et créer. C’est ce qui m’a amené à concevoir nos produits. Au début, je vendais des savons et des sachets aux marchés de producteurs locaux et dans ma petite boutique à la ferme. L’enthousiasme des clients m’a incitée à prendre un risque calculé et, pour la première fois, à contracter un prêt pour agrandir la boutique, améliorer les installations de distillation et ajouter une cuisine commerciale et des bureaux en construisant un nouveau bâtiment de 2 000 pieds carrés sur la propriété.
Les tendances comptent
Après avoir discuté avec ma famille, j’ai décidé de me lancer dans le tourisme expérientiel en m’inspirant des bars de dégustation de l’industrie vinicole. Nous invitions les visiteurs à se promener dans les champs et à en apprendre davantage sur les plantes et sur nos procédés de fabrication. Nous avons aussi organisé des événements saisonniers : tout d’abord une balade dans les allées que nous éclairons après le coucher du soleil, puis une expérience sensorielle à l’intérieur.
Ils avaient l’occasion de goûter des aliments et des boissons et d’essayer des produits fabriqués avec ce qu’ils venaient de voir. Ils pouvaient également créer des produits de beauté ou de soins corporels personnalisés à notre bar d’aromathérapie.
La reconnaissance internationale peut aussi être utile
Nous avons changé nos étiquettes à plusieurs reprises pour qu’elles reflètent mieux la nature de nos produits. Toutefois, c’est la troisième place que nous avons obtenue pour l’un de nos produits de soin du visage dans le cadre du North American Clean Beauty Awards en 2017 qui a été un tournant important. Des produits provenant d’Australie, d’Europe, des États-Unis et du Canada avaient été soumis dans le cadre de ce concours. Cela nous a démontré que nous étions sur la bonne voie et qu’un nombre croissant de personnes sont à la recherche de produits de beauté dignes de confiance et fabriqués de façon plus transparente.
Même un changement que nous n’avons pas choisi peut procurer des avantages
Récemment, un nombre grandissant d’épisodes de fumée de feux de forêt dans la région a eu pour effet de dissuader les visiteurs de se rendre à la ferme. De plus, certains voisins décourageaient les clients de se stationner dans le secteur lors des événements. Puis, la pandémie nous a empêchés de recevoir des visiteurs. Je m’étais lancée corps et âme dans ce projet de tourisme expérientiel, mais pour survivre, j’ai dû m’adapter. Nous avons donc sauté quelques étapes de notre plan d’affaires sur cinq ans pour passer très rapidement au commerce en ligne. Il nous a fallu apprendre à gérer une boutique en ligne et la vente en gros.
Le changement n’a pas été facile, mais c’était une bonne décision, notamment en raison du resserrement constant du marché du travail agricole. Le commerce en ligne a connu un essor fulgurant, tout comme l’information sur les soins de beauté et les publications d’influenceurs que l’on retrouve sur Internet. Nous avons maintenant accès à des clients des quatre coins de la planète, et nous livrons actuellement nos produits partout au Canada.
Prendre des décisions fondées sur des données
Cette année, notre tonique pour la peau à base d’hydrolat de rose de Damas à 100 % a obtenu la deuxième place au concours Clean Beauty Awards. Cette deuxième place au concours est une forme de validation, mais il est aussi important de s’appuyer sur des données. Les renseignements que nous tirons des recherches effectuées sur Google et des commentaires recueillis sur Internet orientent nos décisions d’affaires. Certains de nos anciens meilleurs vendeurs ont grandement perdu en popularité depuis qu’ils sont commercialisés en ligne. Je pense par exemple à notre sel exfoliant à la lavande qui laisse une sensation agréable sur vos mains, ce qui est très difficile à ressentir sur Internet.
Nous avons aussi abandonné certains produits qui demandaient beaucoup de travail. Les produits destinés au secteur culinaire sont maintenant vendus comme aromatisants pour d’autres produits, y compris la crème glacée et le cidre. Ce secteur d’activité dépend en grande partie du réseau que nous avons développé au fil des années, lequel est très important.
Un conseil que j’aurais aimé avoir reçu plus tôt
Prenez le temps de cartographier la topographie et la structure des sols et de bien les comprendre pour savoir ce qu’ils peuvent produire. Certains choix que nous avons faits étaient judicieux, mais nous aurions pu faire mieux, notamment en plantant des arbres à des endroits stratégiques pour atténuer les dommages causés par le vent, tout particulièrement en raison de l’augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes et de la diversité des types de sols.
Présentement, j’envisage de laisser une partie des terres en friche pour accroître la biodiversité. Je suis membre de l’Association canadienne des entreprises familiales depuis de nombreuses années. Lorsque vous faites partie de la troisième génération de producteurs, vous avez aussi ce lien émotionnel avec la terre. En prendre soin à long terme a toujours fait partie de ma stratégie d’affaires.
*L’hydrolat a des qualités semblables aux huiles essentielles pures, mais il est fait à base d’eau. Il est donc moins concentré et peut être utilisé sans risque pour la peau.
D’après un article de l’AgriSuccès par Myrna Stark Leader.
Comment gérez-vous le changement et la mise en œuvre de nouvelles pratiques à la ferme?