Comment reconnaître la volatilité dans un marché
Les estimations de l’équilibre offre-demande pour l’année commerciale 2018-2019 publiées aujourd’hui dans un rapport de l’USDA indiquent une légère amélioration des perspectives de prix du blé et maïs due au rythme plus rapide des exportations dans l’année courante. Les perspectives de prix sont inchangées pour le soya malgré l’anticipation de stocks plus bas à la fin de la présente année.
Le recours à des projections établies sur les prix moyens est un moyen facile de mesurer le potentiel de rentabilité future. Il n’y a pas de doute que les prix évolueront cette année et nous serons probablement en présence de volatilité. Toutefois, la volatilité n’est pas nécessairement une mauvaise chose. Vous pouvez l’utiliser dans votre plan de commercialisation et je vais vous montrer comment le faire.
Commencez par le ratio stocks-utilisation
Le ratio stocks-utilisation peut constituer un bon point de départ. Ce n’est pas un outil parfait, mais il a été un bon indicateur prévisionnel des prix du maïs des États-Unis au cours de sept des neuf dernières années (comme l’indique la Figure 1). Au cours de certaines années, toutefois, la relation entre ce ratio et les prix se rompt.
Les prix moyens du maïs au cours des années commerciales 2012-2013 et 2013-2014 étaient considérablement plus élevés et plus faibles, respectivement, que ceux suggérés par le ratio stocks-utilisation. Il s’avère que les prix du maïs étaient aussi plus volatils pendant ces années‑là.
Les quatre années commerciales représentées à gauche dans le graphique sont les années où les prix ont connu la plus importante volatilité selon la dispersion des prix hebdomadaires du maïs des États-Unis.
La volatilité des prix au cours des années commerciales 2010-2011, 2011-2012 et 2013-2014 était particulièrement importante, c’est-à-dire que les prix se sont écartés davantage du prix moyen annuel qu’ils ne l’ont fait au cours des autres années. En 2010-2011, 95 % des prix du maïs se trouvaient dans un intervalle s’écartant de 36 % de part et d’autre du prix moyen, fluctuant entre 3,78 $ US et 8,01 $ US. En comparaison, pendant l’année commerciale 2014‑2015, 95 % des prix du maïs se trouvaient dans un intervalle ne s’écartant que de 13 % du prix moyen (allant de 3,00 $ US à 3,86 $ US).
Que faut-il retenir? Lorsque le ratio stocks-utilisation est faible, les prix tendent à être plus volatils et plus élevés en moyenne que lorsque ce ratio est plus élevé.
Les sources de volatilité
Les conditions climatiques peuvent avoir des conséquences considérables sur les prix. Des rendements faibles diminuent l’offre, ce qui peut avoir un impact important sur le ratio stocks‑utilisation. Par exemple, en mai 2012, le ratio stocks-utilisation prévu pour la fin de campagne 2012-2013 était de 13,7 %. L’année 2012 a été l’une des années les plus sèches enregistrées dans le Midwest. Les prévisions de rendements pour l’année 2012 ont été révisées à la baisse plusieurs fois et le ratio stocks-utilisation annoncé en août 2013 a finalement chuté à 5,8 %! Ce faible ratio a provoqué une plus grande volatilité.
Les ratios stocks-utilisation du maïs, du soya et du blé prévus pour l’année commerciale 2018‑2019 ne sont pas faibles par rapport aux années passées, ce qui devrait modérer la volatilité. Néanmoins, le temps sec dans le sud des Prairies américaines ainsi que dans certaines régions du Midwest demeure un facteur pertinent à surveiller.
La demande peut aussi avoir un effet sur la volatilité, ce qui implique que le ratio stocks‑utilisation n’est pas toujours une bonne indication de la volatilité future. Le ratio stocks‑utilisation du soya des États-Unis actuellement prévu pour 2018-2019 est plus élevé qu’il l’était pendant neuf des dix dernières années. La reprise des tensions commerciales entre les États‑Unis et la Chine pourrait entraîner une baisse des exportations américaines en 2018‑2019, provoquant une hausse du ratio stocks-utilisation. Dans un tel cas, les prix devraient baisser alors que la volatilité devrait augmenter.
Les prix peuvent également être volatils lorsque le ratio stocks-utilisation est élevé, particulièrement si la demande est à l’origine de la hausse du ratio. Il est très probable que l’année commerciale 2018-2019 constitue un bon exemple de cette situation.
La volatilité n’est pas seulement un paramètre du risque de baisse des prix
La volatilité peut être un indicateur utile. Savez-vous comment la reconnaître et l’utiliser dans la création d’un bon plan de gestion du risque?
Toutes choses égales, un faible ratio stocks-utilisation tend à faire augmenter les prix prévus et à accroître la volatilité. Les chocs de demande peuvent également engendrer une hausse de la volatilité même si l’offre est abondante.
Même si les mesures simples de la volatilité enregistrent aussi bien les écarts positifs que les écarts négatifs par rapport à un prix moyen, les écarts négatifs représentent des occasions de bloquer des prix qui n’existeraient pas dans un contexte de prix stables. Il est important de se doter d’un plan de commercialisation judicieux qui tient compte du risque auquel l’exploitation peut être exposée.
Vice-président exécutif, Stratégie et Impact et économiste en chef
Jean-Philippe est Vice-président exécutif, Stratégie et Impact et économiste en chef à FAC. Il offre des conseils qui aident à orienter la stratégie de FAC et qui servent à identifier les risques et opportunités dans l’environnement d’affaires. En plus d’agir comme porte-parole de FAC pour des questions économiques, Jean-Philippe offre ses commentaires sur l'industrie agricole et agroalimentaire dans des vidéos et le blogue des Services économiques FAC.
Avant de se joindre à FAC en 2010, Jean-Philippe était professeur d’agroéconomie à l’Université North Carolina State et à l’Université Laval. Jean-Philippe détient le titre de Fellow de la Société canadienne d’agroéconomie. Il a obtenu son doctorat en économique de l’Université d’Iowa State en 1999.