Mise à jour des perspectives de 2021 pour le secteur des céréales, des oléagineux et des légumineuses : l’offre limitée devrait faire grimper les prix
Cet article est la deuxième mise à jour trimestrielle de nos perspectives de 2021 pour les grandes cultures publiées en février. Au cours des trois prochaines semaines, nous mettrons à jour les perspectives annuelles pour les secteurs du lait, du bœuf et du porc et du poulet à griller.
Nos prévisions de prix en mai s’étaient améliorées par rapport à nos prévisions publiées en février. Nous les révisons de nouveau à la hausse pour toutes les cultures. L’insuffisance prévue de la production canadienne, la vigueur de la demande chinoise de céréales et d’oléagineux, les préoccupations concernant la sécheresse aux États‑Unis et le resserrement des stocks mondiaux ont fait grimper les prix pour les cultures des années commerciales 2020‑2021 et 2021‑2022.
Alors que la campagne agricole 2020‑2021 tire rapidement à sa fin, quelques tendances de prix sont dignes de mention. Tout d’abord, les prix des cultures pour les campagnes 2020‑2021 et 2021‑2022 sont considérablement plus élevés que leurs moyennes sur cinq ans (tableau 1). En outre, les prix de toutes les cultures de la campagne 2021‑2022 à l’exception du maïs demeurent plus élevés qu’ils l’étaient à pareille date l’an dernier. Selon le plus récent rapport Grain : World Markets and Trade publié par l’USDA, les prix du blé canadien continueront d’augmenter et d’être plus élevés que le blé provenant de tout autre pays.
Tableau 1 : Les prix des cultures de la nouvelle récolte et de l’ancienne récolte continuent de dépasser les prévisions hâtives
Ces prix soutiendront la rentabilité; toutefois, la hausse des coûts de production contrebalancera au moins partiellement l’augmentation des revenus. Les coûts d’intrants dans l’Est du Canada ont crû de 9,3 % par rapport à l’an dernier et de 13,9 % par rapport à leur moyenne sur cinq ans. Dans l’Ouest du Canada, l’écart est encore plus prononcé, avec une croissance de 13,4 % par rapport à l’an dernier et de 16 % par rapport à la moyenne sur cinq ans. Cela aura cependant peu de répercussions pour les producteurs qui ont décidé de réduire ou d’éliminer les traitements de culture en raison de problèmes d’humidité.
Les pertes de rendement tempéreront la rentabilité dans l’Ouest
Nous avons conclu nos perspectives de mai en prévenant que les conditions météorologiques pourraient être le plus important facteur à considérer dans les prévisions de rentabilité en 2021. Nous avons misé juste. Même si les perspectives de mi‑été d’Agriculture et Agroalimentaire Canada au sujet des récoltes ne reflètent probablement pas l’impact total de la sécheresse sur les rendements, la différence entre les rendements de 2020 et ceux de 2021 sera frappante pour plusieurs cultures.
Pour évaluer les effets potentiels du manque d’humidité et des températures élevées, nous avons comparé les plus grands écarts historiques de rendements par rapport aux rendements types à la récolte de 2021. En 2002, une sécheresse généralisée a réduit les rendements de blé de printemps de la Saskatchewan de 47,6 %, les rendements de canola de la Saskatchewan de 30,6 %, des rendements de lentilles de la Saskatchewan de 53,4 % et les rendements d’orge de l’Alberta de 58,2 %. La figure 1 montre l’effet que des pertes de rendement similaires auraient sur les revenus et la rentabilité pour les cultures de 2021‑2022.
Figure 1 : Un écart important des rendements par rapport aux rendements types affaiblira les revenus et les marges de l’année commerciale 2021‑2022
Les conditions dans l’Ouest canadien devraient avoir une incidence importante sur la rentabilité des exploitations agricoles. Une perte de rendement moyenne de 35 % pourrait ramener les marges de profit sous le seuil de rentabilité. Et bien que le rendement moyen prévu soit plus faible à l’échelle globale en 2021, les conséquences seront encore plus dévastatrices pour les exploitations individuelles dont la récolte sera très faible ou réduite à néant.
Cela dit, les prix records du canola et de l’orge pourraient tout de même permettre de dégager des marges positives malgré les importantes baisses de rendement prévues. En outre, étant donné le piètre état des cultures de blé de printemps partout en Amérique du Nord, les producteurs qui ont du blé à forte teneur en protéines pourraient obtenir des primes plus élevées. Les lentilles pourraient également générer des marges positives à présent que l’Inde a réduit ses tarifs douaniers à 10 % et si les rendements ne s’approchent pas trop des planchers historiques.
Figure 2 : Rentabilité positive du maïs et du soya dans l’Est du Canada
Nous nous attendons à ce que les marges de maïs et de soya soient positives pour la période de prévision en 2021 partout dans l’Est du Canada où les rendements ne s’écarteront pas trop des rendements normaux (figure 2). Selon les prévisions de l’USDA, les stocks mondiaux de maïs à la fin de la campagne 2021‑2022 seront supérieurs à ceux de la campagne précédente, mais ils seront inférieurs à ceux de la campagne 2019‑2020, tout comme les stocks de maïs des États‑Unis. Pour ce qui est des prix du soya, ils ont récemment reculé, mais ils continuent de bénéficier de la forte demande mondiale.
La demande mondiale de céréales et d’oléagineux demeure vigoureuse malgré la faiblesse de l’offre
Les achats totaux de céréales secondaires de la Chine ont été étonnamment élevés pendant la campagne 2020‑2021, augmentant de plus de 150 % en glissement annuel et contribuant à faire augmenter les importations mondiales totales de 11,1 %. Les importations de blé en Chine ont augmenté de 95,2 % pendant la même période.
Selon les prévisions, les importations chinoises des principales cultures pendant l’année commerciale 2021‑2022 devraient demeurer près des sommets historiques, ce qui continuera de soutenir les prix et la rentabilité de l’orge et du maïs. Si l’on exclut la Chine, les importations mondiales de blé devraient croître de 5,6 % en glissement annuel et celles des céréales secondaires, de 2,8 %, au cours de l’année commerciale 2021‑2022.
Les achats d’oléagineux de la Chine ont eux aussi chamboulé les marchés mondiaux. Les importations chinoises de soya en 2020-2021 ont été stables après avoir grimpé de 19,4 % en 2019‑2020. En 2021‑2022, les importations chinoises devraient augmenter de 3,9 % en glissement annuel alors que les importations mondiales (excluant la Chine) devraient croître de 2,8 %.
La demande mondiale de lentilles en 2021‑2022 devrait être similaire à celle de 2020‑2021. L’Inde, qui est le plus grand importateur mondial, ainsi que le Bangladesh et les Émirats arabes ont tous les trois accru leurs importations pendant les cinq premiers mois de 2021. Pendant la même période, les exportations totales du Canada ont baissé de 11 % par rapport aux sommets atteints pendant la même période l’année précédente, mais elles ont augmenté de 4,6 % par rapport à leur moyenne sur cinq ans.
Le resserrement des stocks canadiens et la flambée des prix pourraient faire chuter l’utilisation
Au Canada, les stocks de clôture des principales cultures en 2021 devraient être à leur plus bas niveau en huit ans. Les déficits ne feront que créer un autre problème pour les utilisateurs finaux de grandes cultures, faisant grimper leurs coûts des matières premières achetés auprès de fournisseurs canadiens. Comme la production vacillante et la hausse des prix tempéreront la demande, les exportations et les stocks pendant l’année commerciale 2021‑2022 pourraient, selon l’hypothèse la plus optimiste, chuter près des plus bas niveaux jamais enregistrés.
En conclusion
L’année 2020 a été une année record pour de nombreuses personnes. Un an plus tard, nous pourrions voir des records bien différents. Les stocks de clôture, qui étaient déjà faibles l’an dernier en raison de la vigueur des exportations, se sont resserrés davantage. Cela a contribué à l’augmentation des prix et pourrait éventuellement causer un ralentissement de l’utilisation globale. La demande mondiale demeure forte, exerçant davantage de pression sur les stocks. Mais la plus grande difficulté – et question – pour les agriculteurs canadiens en ce moment concerne les rendements. Il reste à savoir à quel point le temps chaud et sec qui sévit dans les Prairies les réduira.
Pour obtenir de l’aide pour votre exploitation agricole, veuillez communiquer avec votre directeur des relations d’affaires de FAC.
Rédactrice économique
Membre de l’équipe des Services économiques depuis 2013, Martha Roberts est une spécialiste en recherche qui étudie les risques et les facteurs de réussite pour les producteurs agricoles et les agroentreprises. Martha compte 25 années d’expérience dans la réalisation de recherches qualitatives et quantitatives et la communication des résultats aux spécialistes de l’industrie. Elle est titulaire d’une maîtrise en sociologie de l’Université Queen’s à Kingston, en Ontario, et d’une maîtrise en beaux-arts en écriture non fictive de l’Université de King’s College.