Rapport 2022 sur le secteur des aliments et des boissons transformés : bilan semestriel
Beaucoup de choses ont changé depuis la publication de nos rapports 2022 sur le secteur des aliments et des boissons transformés, plus tôt cette année, notamment :
L’inflation et les taux d’intérêt ont augmenté plus rapidement que prévu
Les prévisions de la croissance économique mondiale se sont affaiblies
La rentabilité est mise à rude épreuve par la hausse des coûts des intrants
Le recrutement de main‑d’œuvre demeure un problème
Les fabricants de produits alimentaires et de boissons demeurent en bonne posture dans ce contexte difficile, et les perspectives demeurent positives.
Lors de cette présentation virtuelle, Jean-Philippe Gervais, vice-président et économiste en chef à FAC, examine l’évolution des tendances depuis la publication du Rapport FAC sur le secteur des aliments transformés 2022 et du Rapport FAC sur le secteur des boissons 2022.
Les ventes devraient croître et rester vigoureuses
Les ventes des fabricants de produits alimentaires et de boissons ont progressé de 12 % durant la première moitié de 2022. Toutefois, la croissance des ventes devrait ralentir à l’approche du quatrième trimestre en raison des pressions inflationnistes qui s’atténuent, de la croissance économique mondiale qui faiblit et de l’épargne des consommateurs canadiens qui diminue. Nous prévoyons que les ventes augmenteront de 6 % durant le deuxième semestre et qu’elles afficheront une croissance de 9 % à la fin de l’année (tableau 1).
Tableau 1 : Les ventes du secteur de la fabrication de produits alimentaires sont soutenues par les prix plus élevés
Le moteur principal de la croissance des ventes est la mouture de céréales et d’oléagineux. Malgré une augmentation des ventes de 22 %, on estime que les volumes ont diminué, principalement en raison de la baisse de rendement des cultures en 2021.
Les effets de la hausse des prix sur la demande de consommation sont manifestes dans certains secteurs. Nous estimons que les volumes de vente ont diminué dans les secteurs des produits laitiers, des fruits de mer et de la fabrication d’alcool, toutes catégories confondues, au cours des six premiers mois de 2022. Même si l’inflation dans certaines catégories, comme les brasseries, est inférieure à la moyenne, nous constatons que des consommateurs sont contraints de réduire leurs achats en raison de l’inflation qui pèse sur d’autres catégories. Notamment, nous prévoyons que les secteurs des fruits de mer, des brasseries et des établissements vinicoles verront leurs ventes reculer en 2022. Les ventes de fruits de mer diminuent en raison des exportations moins élevées vers les États‑Unis et le Japon.
L’inflation des prix dans le secteur de la fabrication de produits de viande a ralenti et s’est fixée autour de 3 % au cours de la première moitié de 2022 après avoir crû de 8 % en 2021. La consommation totale de viande est en hausse en 2022 grâce à la demande vigoureuse de poulet et de porc, mais les consommateurs ont réduit leur consommation de bœuf (figure 1). Les exportations de bœuf demeurent toutefois vigoureuses, contrebalançant la demande intérieure plus faible. Jusqu’à présent au troisième trimestre, des tendances plus positives se dessinent pour la viande rouge, et nous nous attendons à ce que la consommation et les ventes continuent de croître en 2023.
Figure 1 : La consommation de viande a augmenté en 2022 grâce à la demande vigoureuse de poulet et de porc
Parmi les autres secteurs dont les volumes semblent satisfaisants, mentionnons le sucre et les confiseries, la mise en conserve de fruits et de légumes, les spécialités alimentaires, les boissons gazeuses et les produits de boulangerie‑pâtisserie. Les ventes de ces secteurs devraient terminer l’année en force.
Les marges faiblissent
Comme les consommateurs misent sur l’achat de produits de base à faible marge pour contrer la hausse des prix de détail, et comme les coûts des intrants demeurent élevés par rapport aux prix de vente, les marges brutes du secteur de la fabrication sont sous pression. L’indice de marge brut du secteur de la fabrication de produits alimentaires calculé par les Services économiques FAC a diminué de près de 10 % durant le premier semestre de 2022. Le déclin des prix des produits de base nous porte à prévoir que les marges commenceront à s’améliorer, mais la faible croissance économique prévue au cours des douze prochains mois continuera d’être un vent contraire.
Figure 2 : Les marges brutes du secteur de la fabrication de produits alimentaires et de boissons ont nettement diminué au cours du premier semestre de 2022
Tendances à surveiller d’ici la fin de 2022
La croissance économique mondiale devrait diminuer
L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) prévoit que le produit intérieur brut (PIB) mondial croîtra de 3,0 % en 2022 et de 2,8 % en 2023, ce qui constitue une révision à la baisse par rapport à ses prévisions précédentes. Le PIB de notre plus important partenaire commercial, les États‑Unis, a enregistré deux trimestres consécutifs de croissance négative, et ce, malgré la hausse de 1,5 % des dépenses de consommation au deuxième trimestre. La croissance au cours des prochains trimestres devrait ralentir alors que les craintes de récession persistent. Le PIB de la Chine devrait croître d’environ 3 %, ce qui est nettement inférieur à son taux de croissance historique.
Contraintes liées à la main-d’œuvre
Le taux d’emplois vacants continue de miner de nombreux secteurs, dont celui de la fabrication de produits alimentaires. Les données les plus récentes (juin) indiquent un taux de vacance supérieur au taux de chômage, ce qui contraint les entreprises à hausser les salaires pour attirer des talents.
La rémunération hebdomadaire des employés du secteur de la fabrication de produits alimentaires a augmenté en moyenne de 11,5 % au cours des six premiers mois de 2022 comparativement à la même période il y a un an, tandis que les prix de vente des fabricants ont grimpé de 9,9 %, ce qui exerce de la pression sur les marges.
Croissance de la consommation intérieure d’aliments
L’année dernière, la demande refoulée après la pandémie et les effets bénéfiques de l’épargne élevée des ménages pour le secteur des services alimentaires étaient sur toutes les lèvres. Même si elles se sont concrétisées, ces tendances ont été en grande partie atténuées par l’inflation. En conséquence, les volumes de vente d’aliments en épicerie devraient diminuer d’environ 6 % durant le deuxième trimestre de 2022, bien que cela s’explique en partie par le déplacement des achats des consommateurs vers les restaurants et le prêt‑à‑manger. À mesure que le taux d’inflation faiblira, nous nous attendons à un retour à la normale des habitudes d’achat des consommateurs. Le taux d’épargne des ménages a diminué à 6,2 % au deuxième trimestre par rapport à 14,5 % à la même période l’année dernière. Malgré tout, l’épargne est étonnamment résiliente compte tenu de l’inflation et des hausses de taux d’intérêt et a doublé par rapport au niveau antérieur à la pandémie à la fin du deuxième trimestre.
Expert principal, science des données
Kyle Burak s’est joint à FAC en 2020 et occupe le poste d’expert principal, science des données. Il se spécialise dans la surveillance et l’analyse du portefeuille d’agroentreprise et agroalimentaire de FAC, la santé de l’industrie, et les risques inhérents au secteur. Avant de se joindre à FAC, Kyle a travaillé au service de l’approvisionnement et du marketing d’un détaillant alimentaire canadien. Il est titulaire d’une maîtrise en économie de l’Université de Victoria.