Mise à jour sur les recettes monétaires agricoles en 2023 : le secteur porcin en difficulté, malgré la croissance de l’industrie agricole
Dans nos prévisions de janvier, nous nous attendions à ce que les recettes monétaires agricoles (RMA) continuent de croître en 2023, bien qu’à un rythme plus modéré qu’en 2022. Si les RMA de certains secteurs ont varié depuis janvier, nos projections de juin pour le total des RMA du Canada restent inchangées. Nous prévoyons une croissance des RMA de 4,5 % en 2023, ce qui permettra de compenser les coûts élevés des intrants.
Cette analyse ne porte que sur les revenus, et une hausse des RMA ne se traduit pas nécessairement par une augmentation des bénéfices des exploitations agricoles.
Les Prairies affichent une croissance, tandis que le secteur porcin limite la croissance des recettes au Québec et en Ontario
Statistique Canada a publié les RMA pour 2022 en mai, ainsi que des révisions pour les années précédentes. Les révisions étaient suffisamment importantes pour modifier l’orientation de plusieurs prévisions pour 2023. Par exemple, nous prévoyons maintenant une baisse des recettes tirées du maïs en glissement annuel, parce que les chiffres de l’année 2022 ont été fortement révisés à la hausse, alors que nos prévisions initiales pour 2023 indiquaient une légère augmentation.
Nos projections de la variation des RMA en glissement annuel en 2023 (tableau 1) intègrent les estimations de RMA de Statistique Canada pour le premier trimestre et des données provenant d’autres sources. Les augmentations les plus importantes prévues pour les RMA en 2023 concernent les provinces des Prairies et le Canada atlantique. L’Ontario et le Québec devraient connaître une baisse en 2023, principalement en raison de la diminution des recettes du secteur porcin et des cultures. Quant à la Colombie-Britannique, la baisse est attribuable à la diminution de la totalité des recettes des cultures.
Tableau 1 : RMA réelles et prévues par province/région
Les recettes des céréales, oléagineux et légumineuses devraient continuer de croître en 2023, après une année 2022 marquée par une forte croissance
Les RMA des céréales, oléagineux et légumineuses devraient augmenter de 7,7 % en 2023 (tableau 2), après avoir enregistré une forte croissance de 19,9 % en 2022. Nos prévisions de croissance pour 2023 ont légèrement diminué par rapport aux prévisions de janvier, en raison de la révision à la hausse des données réelles pour 2022.
Les recettes du maïs et du soya devraient baisser en 2023. Alors qu’en 2022, les prix des cultures ont atteint un niveau historiquement élevé, une certaine régression est à prévoir en 2023. Dans les Prairies, nous nous attendons toujours à ce que des cultures comme le canola, le blé, les pois et les lentilles affichent une forte croissance, à mesure que le reste de la récolte de 2022 est commercialisé. Nous prévoyons donc des rendements moyens en 2023. Les prix des cultures restent supérieurs à leur moyenne quinquennale en raison des pressions exercées sur les ratios stocks-utilisation à l’échelle mondiale. Bien entendu, l’apparition de temps sec aux États-Unis [en anglais seulement] et la menace de la Russie de ne pas reconduire l’accord de la mer Noire [en anglais seulement] pourraient faire remonter les prix au second semestre de 2023 et donner lieu à des recettes réelles plus élevées que nos prévisions actuelles.
Tableau 2 : RMA réelles et prévues pour les cultures sélectionnées
Les recettes tirées de l’élevage varient
En six mois, la situation des marchés bovins et porcins a changé considérablement. Les prix des bovins ont continué à augmenter depuis janvier, compensant ainsi la baisse des volumes commercialisés et entraînant une hausse de 15,1 % des RMA prévues pour 2023 (tableau 3). Cela fait suite à une croissance de 16,5 % en 2022, alors que la forte demande des consommateurs avait surpassé l’offre, le cheptel bovin nord-américain étant en déclin. Le maintien des prix élevés des bovins a entraîné une augmentation de nos projections de RMA pour 2023 depuis le mois de janvier.
En revanche, les perspectives pour le secteur porcin ne sont pas bonnes. Les prix américains à terme pour le porc ont baissé en raison de la diminution des demandes d’exportation, la production chinoise de porc ayant rebondi après avoir enregistré un creux récemment. En outre, les prix canadiens ont été touchés par des contraintes de capacité d’abattage dans l’Est du Canada. Ces facteurs de marché imprévus ont perturbé le secteur porcin et nous ont incités à modifier nos prévisions de RMA pour 2023, qui étaient initialement positives en janvier, pour en arriver à une baisse de 9,0 %.
Tableau 3 : RMA réelles et prévues pour certains secteurs de l’élevage
Pour donner suite à l’augmentation des coûts de l’alimentation du bétail et de l’énergie, la Commission canadienne du lait a augmenté le prix de soutien du beurre le 1er février 2023, estimant qu’il en résultera une augmentation de 2,2 % du prix du lait. Le lait commercialisé devrait également connaître une légère croissance et, par conséquent, les RMA des produits laitiers devraient augmenter de 4,6 % en 2023. Cette croissance est légèrement inférieure aux prévisions de janvier.
En conclusion
Nous prévoyons une croissance des RMA pour la plupart des secteurs agricoles en 2023. Les faibles baisses prévues pour le maïs et le soya sont dues aux prix et aux rendements excellents et supérieurs aux prévisions pour 2022. Les projections de RMA pour le secteur porcin sont passées de positives à négatives au cours des six premiers mois de l’année, ce qui montre à quel point l’économie agricole peut changer rapidement. Ce revirement de situation illustre une fois de plus la nécessité de mettre en place des stratégies efficaces de gestion des risques. À l’approche de l’été, les rendements et les prix des cultures dépendront de conditions suffisamment bonnes pour conclure l’année 2023 en beauté.
Économiste principal
Justin Shepherd est économiste principal à FAC. Lorsqu’il s’est joint à l’équipe en 2021, il se spécialisait dans la surveillance de la production agricole et l’analyse des tendances de l’offre et de la demande à l’échelle mondiale. En plus de faire des présentations sur l’agriculture et l’économie, Justin participe régulièrement au blogue des Services économiques de FAC.
Il a grandi dans une ferme mixte en Saskatchewan et il est toujours actif au sein de l’exploitation agricole familiale. Justin est titulaire d’une maîtrise en économie appliquée et gestion de l’Université Cornell, ainsi que d’un baccalauréat en agroentreprise de l’Université de la Saskatchewan.